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02-07-2009

 

Coup d’Etat au Honduras, qui est derrière ?

 

 

Le Honduras et son président élu

 

Les chefs de l’armée hondurienne ont renversé, il y a quelques jours le président de cette petite république d’Amérique centrale, avec le soutien de l’oligarchie financière locale et des planteurs.

 

Cela faisait des décennies que les généraux fascistes, dans ce pays comme dans d’autres d’Amérique latine, n’avaient pas fait parler d’eux. Voici que l’état-major de l’armée hondurienne se rappelle à notre bon souvenir.

 

Le président Zelaya ne peut certes pas être qualifié de révolutionnaire, mais c’est un réformiste, qui a relevé le salaire minimum et a laissé l’organisation syndicale paysanne exercer ses revendications sans l’habituelle répression. Il a ensuite rétabli les relations diplomatiques avec Cuba et fait adhérer son pays à l’ALBA (alliance bolivarienne des Amériques) qui constitue à la fois une union politique et une sorte de contre marché par rapport à l’espace de libre-échange des Amériques piloté par l’impérialisme US. Il l’a fait pour disposer d’une aide économique et des concessions pétrolières.

 

Tout en n’étant pas un "dangereux communiste", Zelaya a pris des mesures qui ont fortement déplu aux capitalistes locaux et aux compagnies US, et l’adhésion à l’ALBA n’est pas la moindre. Voilà qu’il s’était mis en tête d’organiser un  referendum afin de procéder à l’élection d’une assemblée constituante et d’obtenir la possibilité de solliciter un second mandat de président de la République. Cette démarche avait reçu le soutien des trois syndicats du pays et la signature de 400 000 Honduriens.

 

Même si la marge est étroite, cette consultation permettrait d’offrir la possibilité au moins théorique d’en finir avec des décennies de partage du pouvoir des politiciens de deux partis officiels (parti libéral et parti national), des hauts militaires et des grands de l’église catholique comme des courants évangélistes.

 

L’armée hondurienne

 

Les militaires ont essayé de faire le ménage : agression de l’ambassadeur de Cuba, arrestation de partisans du président et de journalistes progressistes comme ceux de Telesur ; mais le peuple n’accepte pas le renversement du président et des heurts opposent les factieux aux démocrates dans les rues de Tegucugalpa ; dans certaines régions de la campagne, des militaires ont proclamé leur soutien au président Zelaya.

 

L’armée hondurienne mérite qu’on s’arrête brièvement sur son parcours. Des  années 60 jusqu’aux années 90, le Honduras a été le seul pays a ne pas connaître de conflit armé ouvert, à la différence des pays voisins (Guatemala, Nicaragua, El Salvador). Cette conjoncture régionale a néanmoins donné prétexte aux gouvernements de l’époque pour imposer plusieurs décennies de ce qui s’est appelé la "politique de sécurité nationale", un euphémisme pour désigner des années de répression et de terreur auquel des milliers d’opposants n’ont pas survécu.

 

En l’absence de conflit déclaré, pas d’accords de paix, pas de politique, dite de réconciliation, pas d’états d’âmes concernant les crimes du passé, pas de justice. Les associations de familles de disparus continuent de réclamer les leurs, les opérations militaires continuent à semer ponctuellement la terreur dans les campagnes. L’impunité est reine…

 

Rappelons, au passage, que le Honduras détient le palmarès des morts en milieu carcéral. A plusieurs reprises en effet, et dans un passé récent, des mutineries dans les prisons ont été matées à feu et à sang (et ce, dans le sens littéral des termes), causant de nombreuses victimes.

 

Le  protecteur yankee

 

Par ailleurs, il faut également mentionner que le Honduras a été et reste la base arrière des opérations militaires étatsuniennes ouvertes et occultes dans la région. La base militaire de Palmerola (proche de la capitale) est la plus importante à subsister en Amérique centrale. On comprend donc aisément la sensibilité extrême du grand voisin du nord à tout changement politique qui pourrait, à terme risquer de remettre en question sa présence dans la zone. A ce titre les accusations de corruption formulées il y a peu par l’administration Obama à l’encontre du  président Zelaya doivent  à postériori, être considérées comme une manière de déclencher les hostilités ou en tout cas de donner le feu vert à la classe politique et à l’armée hondurienne pour reprendre fermement le pouvoir en mains.

 

Il paraît donc plus vraisemblable que les dirigeants des USA soient dans le coup. Jamais l’armée hondurienne n’aurait osé bouger sans leur accord ; d’ailleurs, l’appel au dialogue entre Zelaya et les putschistes formulé par Obama est éclairant à ce sujet.

 

C’est que la chose est d’importance pour l’impérialisme dominant : au-delà de la question militaire, c’est l’influence de l’United Fruit Company, la multinationale bananière US, et les bénéfices de ses actionnaires, les vrais dirigeants de ce pays depuis plus d’un siècle, qui sont en jeu.

 

On peut aussi évoquer l’inquiétude des multinationales pharmaceutiques. Au Honduras, plus de 80% des médicaments sont fournis par les entreprises multinationales, dont les matières premières pour la production sont importées à 100%, principalement des États-Unis et d'Europe. Les pays d'origine de ces médicaments sont le Panama, le Costa Rica, le Guatemala et les États-Unis. Les laboratoires des transnationales tels que Glaxo, Sanofi et Smith Kline se trouvent au Panama, tandis que Pfizer et Stein sont situés au Costa Rica, Novartis, Aventis et Bristol Myers au Guatemala. Or, Zelaya avait passé un accord avec Cuba afin d’importer, à bien moindre coût, des médicaments génériques de l’île des Caraïbes ; de plus, les dirigeants de l’ALBA se sont récemment engagés à « promouvoir un modèle d'appropriation sociale des connaissances pour permettre de surmonter des obstacles dans la production de biens essentiels à la vie comme la nourriture et la santé. ».

 

Solidarité avec le peuple du Honduras

 

Les intérêts vitaux des multinationales, on le voit, sont aussi précieux à Obama qu’ils l’étaient à Bush et ses autres prédécesseurs. Mais la lutte que mènent les Honduriens et la solidarité active qui se développe dans la région, sans parler de la résolution du président Zelaya de retourner chez lui jeudi, laisse penser qu’Obama a manqué son coup

 

"Communistes" condamne cette tentative de putsch et appelle de ses vœux la restauration du président Zelaya. Le peuple hondurien a la possibilité de renverser les factieux et de mener son processus de démocratisation, il a droit à notre entière solidarité.

 

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