11-04-2006 Après
les élections israéliennes, où en
sommes-nous ? |
1. Les élections législatives de mars 2006 Le parti QADIMA du
Premier ministre Ehud Olmert, réputé centriste, l’a emporté, mais moins
facilement que prévu. Dans la lignée de Sharon, l’idée défendue par Qadima et
les Travaillistes de décider unilatéralement des frontières «définitives» de
leur Etat semble avoir fait recette. Le Likhoud, parti de droite
traditionnelle, l’a appris à ses dépens. Mais on ne saurait
oublier d’autres facteurs : — 40 % des inscrits ne se
sont pas rendus aux urnes ; —
le score même du Parti travailliste et celui d’un nouveau parti défendant
les droits des retraités, Gil, qui obtient 7 députés, montrent que les
questions sociales n’étaient pas absentes du scrutin. —
Le taux de chômage est de 10% ; 63% des retraités ne touchent
pas de pension, 25% d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Les
indemnités de chômage ont été réduites et les critères d’obtention durcis, l’âge
de départ à la retraite a été retardé, les budgets sociaux ont rétréci comme
peau de chagrin tout comme ceux de l’éducation et de la santé, le salaire
minimum gelé. Voyons maintenant ce qui va advenir de tout cela mais d’abord, intéressons-nous à la «démocratie»
israélienne. 2.Un système d’apartheid Certains voudraient
faire de ce pays un modèle de démocratie alors que, par bien des aspects, son
système politique se rapproche de celui de l’ex-apartheid sud-africain. Ainsi
: — La confiscation de terres et d’habitations
appartenant à des Palestiniens vivant en Cisjordanie est autorisée depuis
1967. — Les Palestiniens de Jérusalem-Est
sont considérés non comme des citoyens, mais des résidents permanents sous
occupation militaire ; ils sont l’objet de ce que l’on appelle le «racisme
gris» : la planification urbaine restreint leur espace vital et groupe les
habitants par «communautés» ; des restrictions leur sont imposées dans leurs
déplacements. — Les Arabes israéliens, c’est-à-dire
ceux qui vivent dans le territoire initial de l’Etat d’Israël, datant de
1948, ont le droit de vote. Mais leurs enfants vont dans des écoles à part
: il y a des écoles pour Arabes
et des écoles pour Juifs (lesquelles sont dotées environ deux fois plus par
le gouvernement), la mention Juif ou Arabe est obligatoire sur la carte d’identité. — Depuis l’ère Sharon une nouvelle
loi, la loi de Nationalité et d’Entrée en Israël empêche les Israélien (nes) épousant
des Palestinien (nes) d’emmener leur conjoint (e) vivre dans le pays. 3.Quelques jalons
de l’histoire de la guerre israélo-palestinienne En 1967, Israël a
occupé illégalement la Cisjordanie et la bande de Gaza. La résolution 242 de
l’ONU en ordonne toujours l’évacuation, mais, depuis la fin de l’URSS, elle
semble avoir été oubliée dans un coin des archives de l’Organisation par les
puissances capitalistes qui la dirigent, USA en tête. Depuis 1967, des
colonies juives se sont implantées partout dans les territoires, bénéficiant évidemment
d’avantages financiers refusés aux Palestiniens sous occupation militaire.
Une bonne partie des dirigeants politiques et militaires israéliens réclama dès
lors la constitution d’un Grand Israël, fondé sur le retour au royaume
mythique de David et Salomon, largement évoqué dans la Bible, mais dont on
sait aujourd’hui, grâce à des recherches d’archéologues et historiens israéliens
qu’il n’a jamais existé. Certains ont pu
croire, de bonne foi, que les accords d’Oslo allaient changer tout cela, il n’en
fut rien. Par cette négociation, les dirigeants israéliens ont obtenu de
toutes les composantes de l’OLP la reconnaissance de l’Etat d’Israël, c’est-à-dire
le renoncement à l’existence d’un Etat laïque unique englobant Palestiniens
et Israéliens. Les Palestiniens ont obtenu une relative autonomie dans un
territoire amputé, puisque Jérusalem-Est n’y figurait pas. Néanmoins la présence
de l’armée israélienne et des colonies ne pouvait laisser croire à personne
que les Palestiniens avaient obtenu leur indépendance. Après la mort de
Rabin, les plans successifs ont rogné les quelques acquis des Palestiniens.
De Netanyahu à Sharon en passant par Barak, les gouvernements qu’ils soient
de droite de gauche ou du centre, puisqu’il paraît que Sharon était «centriste»
ont réglé par la force le cas de Jérusalem et tiré un trait sur le droit au
retour de quatre millions de Palestiniens, au mépris des résolutions de l’ONU,
mais avec la bénédiction des autorités US et de leur «feuille de route». Le principe de cette
feuille de route supposait un accord avec la bourgeoisie palestinienne, que
représente de Fatah de Mahmoud Abbas. Pour leur donner des gages, Sharon a
procédé à l’évacuation des colonies de la bande de Gaza. Mais il n’y a pas à
s’y tromper : il ne s’agit pas d’un recul : ces ex-colons ont été logés dans
des endroits, à l’intérieur d’Israël, pour faire pendant à la population
arabe d’Israël, car les dirigeants de l’Etat hébreu ont un grave problème de
démographie : les Arabes deviennent de plus en plus nombreux. 4.Les élections
palestiniennes ont changé la donne. La victoire du Hamas
aux élections palestiniennes fut la marque nette de la volonté des
Palestiniens de ne pas faire de compromis avec l’occupant colonisateur, de la
volonté de voir respectées les résolutions internationales. C’est d’ailleurs
ce qui motive le refus du Hamas de reconnaître Israël : impossible tant que l’occupation
aura lieu. Il faut noter que le FPLP, une des ailes progressistes de l’OLP,
dont l’armée israélienne a récemment kidnappé le secrétaire général dans une
prison palestinienne sans susciter la moindre réaction des grands pays
capitalistes, est revenu sur sa reconnaissance d’Israël il y a quelques années
et adopte de nouveau l’ancienne
position : un Etat unique laïque. Cette victoire du
Hamas a changé la donne pour les autorités israéliennes, non à cause du «terrorisme»
mais parce que le désaveu du Fatah empêche désormais le gouvernement de
Tel-Aviv de s’appuyer sur aucune force en Palestine qui jouerait les «collabos».
Ils doivent donc se débrouiller seuls. Ce fut le choix de Sharon et c’est après
sa victoire un peu courte, celui
d’Olmert aujourd’hui : fixer unilatéralement des frontières à l’Etat d’Israël
et laisser les Palestiniens de l’autre côté dans une espèce de bantoustan à
la sud-africaine, le tout étant, on le sait, agrémenté d’un mur. 5.Pourquoi Olmert
renonce-t-il au «Grand Israël» ? Dans cette affaire,
le centre et la gauche israéliens apparaissent comme plus modérés que la
droite et les fascistes du parti «Notre Maison Israël» ou les ultra-religieux
: ils troquent leur Grand Israël contre une sorte de Moyen Israël qui n’engloberait
qu’une partie de la Cisjordanie : ils se proposent donc de démanteler encore
quelques colonies, ce qui fait hurler les plus réactionnaires. Mais il ne faut pas
se tromper sur leurs raisons : elles n’ont rien de la réflexion de soi-disant
modérés. Qui peut croire enfin que Sharon, le boucher de Sabra et Chatila
puisse être de quelque façon un «modéré»
? Laissons parler Ehud Olmert : « Le moment le plus douloureux de ma vie a été
celui où j’ai compris que la comptabilité était plus forte que l’histoire et
la géographie d’Israël. J’ai constaté avec effarement que si nous nous entêtions
à tout garder, en 2020, il y aurait 60% d’Arabes et 40% de Juifs. » Ecoutons-le une nouvelle
fois : « Le jour est proche où une majorité de Palestiniens dira : «Nous
ne voulons plus deux Etats. Donnez-nous seulement le droit de vote.» Alors ce
jour-là, nous aurons tout perdu. » Encore cette sacrée démographie ! Voilà une nouvelle
preuve, s’il en manquait, que rien n’a changé. Les dirigeants israéliens,
depuis 1948 et surtout 1967, quels qu’ils soient, n’ont jamais eu qu’un seul
objectif : faire vivre leur état théocratique et raciste sans s’occuper des
autres, et, pour cela, écraser les Palestiniens, en les chassant, leur
prenant leurs terres, les éliminant ou les colonisant. 6.En guise de
conclusion Quel qu’eût été le
vainqueur des élections, les Palestiniens auraient eu du mouron à se faire.
La victoire d’Olmert et la formation du gouvernement de coalition de centre
gauche qui va en résulter n’ont rien de rassurant. Pas question de se référer
aux résolutions de l’ONU. Pas question d’évacuer les territoires occupés, de
rendre la terre aux Palestiniens que l’on a spoliés. Pas question de
permettre le droit au retour des réfugiés, pas question de rendre la partie
Est de Jérusalem à ceux qui y vivent ! Pas question de permettre, aux frontières
d’Israël, l’existence d’un Etat palestinien indépendant. Voici ce que, dans
leur mansuétude, les dirigeants réélus d’Israël daignent accorder aux
Palestiniens : un territoire contrôlé par l’armée israélienne, clôturé par un
mur, comprenant les moins bonnes terres du pays, réduit à moins de la moitié
des anciens territoires occupés. Dans le même temps, l’Etat
hébreu, qui s’arroge le droit de juger malvenu le vote des Palestiniens, a
pris la décision de ne plus reverser les droits de douane et les taxes qu’il
perçoit au nom de l’Autorité Palestinienne, soient 50 millions de dollars par
mois. Dans le même temps, USA et UE gèlent les subventions et les avoirs de
la même Autorité palestinienne. Ils organisent une situation catastrophique
pour le peuple palestinien. La seule manière de défendre
les droits des Palestiniens est de revenir aux résolutions de l’ONU ; ces résolutions
dont la non-application, décidée par ceux qui la dirigent est la cause de
tous les maux. Les Palestiniens ne demandent qu’une chose : la résolution
242, c’est-à-dire le retour d’Israël dans ses frontières de 1948, les seules
reconnues par l’ONU, le retour des réfugiés et l’évacuation de tous les
territoires occupés, donc de toute la Cisjordanie, cela passe par le démantèlement
de toutes les colonies juives illégalement créées en Cisjordanie. Recommander cet article à un(e) ami(e)
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