COURRIER

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26/08/2010

 

On nous écrit,

 

 

 

 A la suite d’un texte paru dans la revue : « la fonction publique notre bien commun » du N° 174 de mars du « Guide » de l’UGFF (Union Générale des Fédérations de Fonctionnaires CGT), nous avons reçu un courrier d’un responsable syndical CGT en réponse à ce texte sur l’Europe. Cette réponse est adressée aux secrétaires généraux de l’UGFF et de Fédération des Services Publics CGT. Cette lettre évidemment n’engage que son auteur. Nous en publions des extraits selon nous significatifs. L’intégralité de ce texte peut-être consultée sur demande à l’adresse suivante : sntrsgm@vjf.cnrs.fr

 

Camarades,

 

La lecture du chapitre « sur les enjeux européens » du supplément « la fonction publique notre bien commun » du N° 174 de mars du « Guide » de l’UGFF appelle de ma part les commentaires suivants.

 

Selon l’UGFF, la construction européenne serait sous tendue « par une doctrine libérale selon laquelle la régulation des rapports économiques et sociaux doit être placée hors du champ d’intervention de l’Etat» « Le choix politique arrêté dès l’origine était donc un recul de l’intervention publique, le rôle assigné aux institutions européennes ». « Un tel projet s’opposait pourtant au modèle de l’Etat providence ou social qui dans l’immédiat après guerre s’est imposé sous diverses formes dans pratiquement tous les pays d’Europe » etc…

 

Pour l’UGFF et la fédération des services publics, les rapports économiques et sociaux ne sont pas déterminés par l’intervention de l’Etat ! C’est hallucinant, alors que le rôle de l’Etat n’a jamais été aussi prégnant dans l’organisation de la société. C’est l’Etat qui définit les conditions de l’exploitation, c’est lui qui à travers les gouvernements successifs n’a cessé d’accroître l’assujettissement des salariés au patronat public et privé, de diminuer les dépenses socialisées au profit de l’accumulation du capital. Le libéralisme tel que l’entend l’UGFF a disparu dans la seconde partie du 19e siècle avec la naissance des Etats modernes.

 

Quant au « modèle de l’Etat providence » de l’après-guerre, c’est une réécriture falsifiée de l’histoire. Le rapport des forces à la Libération était en défaveur des bourgeoisies nationales compte tenu de la collaboration de la plupart d’entre elles avec l’Allemagne nazi et du rôle de l’URSS et des mouvements de résistance dans l’écrasement du nazisme. Très rapidement, les forces dominantes tentèrent de revenir sur les conquêtes sociales qu’elles avaient dû concéder.

 

(….) Si la monnaie unique, l’Euro, a fait disparaître les disparités entre les monnaies nationales (différentiels de taux de change et des taux d’intérêts), elle n’en a pas fait disparaître les causes : le différentiel de productivité industrielle entre chaque Etat. Elle les a amplifiées en permettant aux entreprises de s’installer comme elles l’entendaient dans la zone euro. Cette liberté conférée au capital de se déplacer comme il l’entend dans l’espace économique européen sans aucun contrôle étatique a exacerbé la guerre économique entraînant la fermeture d’entreprises, la désertification des régions. Les conséquences nous les connaissons, le creusement de la dette et son report sur les salariés.

 

Concernant les services publics et la fonction publique le terme « bien commun » ne veut pas dire grand-chose. Il s’agit comme la monnaie d’un rapport social ! La fonction publique appartient par définition à l’Etat. Ce dernier n’a aucune raison de valoriser son capital puisque contrairement au capital privé il ne sert pas à créer le profit. Dans le cadre d’une lutte de captation maximum de profit au niveau mondial, les besoins de financement du capital privé par les Etat sont considérables. La satisfaction de ces besoins amène les Etats à dévaloriser massivement le capital public. Cette dévalorisation entraîne une dégradation du service public et un transfert de pans entiers de la puissance publique au privé qui a un besoin vital d’élargir ses zones de profit. Il n’est pas acceptable que concernant les services publics le texte ne pose à aucun moment la question de la propriété de ces services, comme si cette dernière était sans importance.

 

La construction européenne n’est pas structurée par l’idéologie mais par la volonté des forces politiques dominantes d’assurer au capital le maximum de rentabilité.

Le caractère superficiel de l’analyse de la structuration de l’Europe politique débouche sur des propositions inacceptables.

Au nom de la démocratie, l’UGFF et la fédération des services publics demandent « l’attribution d’un réel pouvoir d’initiative législatif pour le Parlement européen » « un contrôle politique sur la BCE qui ne doit pas privilégier une monnaie forte au profit des intérêts financiers »

 

Un Parlement européen doté d’un pouvoir d’initiative législatif marginalise les Parlements nationaux. La revendication de l’élargissement de la démocratie déconnectée d’une quelconque analyse de classe va dans le sens d’une Europe supranationale.

Quel contrôle politique peut être exercé sur la BCE ? Seul un pouvoir politique supranational peut exercer un tel contrôle. Mais ce pouvoir n’existe pas et n’existera pas.

 

Nous sommes au cœur des contradictions de la construction européenne. La recherche de la plus grande liberté de mouvement possible du capital et de l’assujettissement le grand possible du salariat à ce même capital va dans le sens d’une organisation supranationale des Etats. Mais ce mouvement entre en contradiction avec la nature même du capitalisme qui n’existe pas sans les Etats nationaux. L’organisation politique de l’Europe ne peut aller au-delà de l’organisation de la guerre économique et des règles de l’assujettissement des salariés au sein de sa zone géographique. La liberté de mouvement du capital n’a jamais fait disparaître les antagonismes entre Etats nationaux.

 

Le poids de la dette amène les Etats européens dont les excédents commerciaux sont élevés à ne pas vouloir payer pour les autres. La déréglementation financière a créé la dette, dont la liquidation entraîne les Etats dans une logique d’affrontement.

 

Demander que les décisions soient prises à la majorité qualifiée va dans le sens de la supranationalité. Les décisions à la majorité qualifiée ne concernent pas seulement les paradis fiscaux !!!

 

Demander « la mise en place d’une réelle fonction Publique européenne…. » est une aimable plaisanterie. Que veut dire réelle ! L’UGFF demanderait-elle la mise en place d’une fonction publique identique partout quelque soit l’Etat ? Or, chaque Etat à son organisation qui lui est propre, héritée de son histoire, il ne nous appartient pas d’ériger la Fonction publique française en modèle exportable à tous les pays d’Europe.

 

Les mesures économiques préconisées sont de nature monétariste. Elles ne s’attaquent pas à la stratégie des entreprises. L’impôt européen sur les transactions financières (taxe Tobin, Attac) sert avant tout à moraliser le capitalisme et ne s’attaque en rien à la nature des transactions financières. Il faut revenir sur deux décennies de déréglementation. Il est fondamental de contrôler les mouvements de capitaux. Le capital ne peut faire comme bon lui semble en fonction de ses stratégies de profit, investissant là ou il veut, désertifiant comme il l’entend. Il faut subordonner les stratégies des entreprises à l’Etat. Pour ce faire, la banque centrale nationale doit contrôler les mouvements de capitaux. Ce contrôle de la banque centrale nationale implique la sortie de l’euro et le retour aux devises nationales. La masse des échanges et leur diversité implique le recours à une monnaie commune s’appuyant sur les monnaies nationales.

 

Le capitalisme monopoliste financier mondialisé (CMFM) qui a remplacé le capitalisme monopoliste d’Etat ne s’est pas traduit par la disparition du rôle de l’Etat, mais par le changement de son rôle (…) Il faut réintroduire l’intérêt collectif qui n’a de sens que dans le cadre national, cadre historique identitaire. Par le contrôle des mouvements de capitaux, la banque centrale nationale sous l’autorité du gouvernement soumet les stratégies des entreprises à l’Etat.

Cette subordination dans le cadre national est indispensable pour que la Fonction publique comme les services publics répondent à l’intérêt général.

Amitiés syndicales

Gilles Mercier

Membre du Bureau national du SNTRS-CGT

 

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