Depuis des
décennies, le Proche Orient est
traversé par d’interminables conflits
dont l’idéologie dominante et les
médias nous cachent les raisons.
Dans cet
article et ceux qui suivront nous vous
proposons des éléments de réflexion
permettant de mieux savoir à quoi s’en
tenir sur cette question.
Deux
éléments essentiels sont à l’origine
des évènements qui secouent le Proche
Orient depuis la fin de la 2ème
guerre mondiale. Le premier c’est la
richesse de cette région du monde qui
compte près de la moitié (49% des
réserves mondiales de pétrole avec 8
pays dans les 15 premiers (Arabie
Saoudite, Iran, Irak, Koweit - Emitats
Arabes Unis – Libye – Qatar – Algérie)
Le Moyen Orient dispose de 745
milliards de barils de réserve et
l’Arabie Saoudite à elle seule de 264
pour une réserve mondiale de 1200
milliards de barils.
Le 2ème
élément c’est l’importance stratégique
de cette région, carrefour décisif entre
l’Asie, l’Afrique, l’Europe.
Cette
situation explique l’affrontement
croissant et de plus en plus dangereuse
pour la Paix mondiale que se livrent
les grands groupes capitalistes et les
Etats à leur solde, Etats-Unis en tête.
A paraître
la semaine prochaine :
*L’état
général du proche Orient
*La fin de
l’URSS et ses conséquences
*Le plan US
pour le proche Orient
*Pourquoi
Israël a-t-il attaqué maintenant ?
*La position
de notre parti
Quelques repères
historiques
Le pourquoi de
l’existence de l’Etat d’Israël
Cet Etat est
présenté par nos media comme le
parangon de ce qu’ils appellent la
démocratie. C’est un Etat religieux et
même théocratique, donc forcément
discriminatoire vis-à-vis des gens qui
adoptent d’autres religions et surtout
de ceux qui n’en ont pas. Ainsi, la
mention de la religion est obligatoire
sur la carte d’identité, le mot athée
ne peut y figurer.
Il a été
installé en 1948 par la Grande
Bretagne, qui avait un mandat sur la
Palestine et les autres Etats dominants
du moment. La création d’un Etat juif
était réclamée par les organisations
sionistes depuis longtemps : dès
les années 1900, elles avaient organisé
des passages en Palestine. La
déportation et le génocide des Juifs
perpétré par les nazis firent que cette
vieille revendication de devenir
réalité. Après Auschwitz, tout le monde
peut comprendre la volonté de création
d’un Etat, mais pourquoi en
Palestine ?
Le point
d’appui est un document religieux, la
Bible, qui certifie qu’un grand royaume
hébreu a occupé au début du premier
millénaire avant notre ère le
territoire qui correspond à la
Palestine, la Cisjordanie et même une
partie de la Jordanie actuelle. Nous
savons définitivement aujourd’hui, avec
l’aide notamment de chercheurs de
l’université de Tel Aviv, que tout ceci
est faux : c’est un gigantesque
leurre fabriqué par les dirigeants et
historiens sionistes du XIXème siècle.
Le mouvement
sioniste
Il est né
dans l’Allemagne cherchant sa voie,
entre l’Autriche et la Prusse. Les
historiens qui ont réalisé le puzzle du
sionisme étaient et s’adressaient à des
Ashkenazi, cette population d’Europe de
l’est et du centre pratiquant la
religion juive. Ils ont fabriqué une
communauté ethnique là où il n’y avait
qu’une religion commune. Pour cela, ils
ont présenté la Bible comme
une source historique absolument fiable
décrivant la réalité de l’Histoire du
peuple hébreu. Ils ont même popularisé
la fable de la religion juive qui ne
serait pas prosélyte, alors que les
Khazars, population turcophone, des
Berbères, des Persans et des Slaves ont,
au cours des siècles, été convertis à
la religion judaïque. Ces faits furent
cachés et la version officielle seule
transparut : les Hébreux, le
peuple juif, ont connu une diaspora et
se sont répandus en Europe, en Asie et
en Afrique, sans jamais convertir.
C’est historiquement faux, y compris la
diaspora, mais cela a parfaitement
réussi à souder un certain nombre de
ces gens qui parlaient yiddish et
étaient victimes de mauvais traitements
et de pogroms notamment dans les
régions d’Europe fortement influencées
par la religion catholique :
Hongrie, Croatie, Pologne, Ukraine,
Autriche et Allemagne du sud.
Il faut
noter qu’au-delà du fondateur officiel,
Herzl, le courant sioniste n’est pas,
au début du XXème siècle, forcément
réactionnaire, au contraire. Il existe
des organisations sionistes qui sont
des composantes du mouvement ouvrier
socialiste. D’ailleurs, les fondateurs
d’Israël, Ben Gourion en tête, étaient
des socialistes, laïcs qui se sont
contenté d’utiliser une Bible laïcisée,
sans référence personnelle à dieu ni à
diable. Les kibboutz sont un exemple de
ce côté progressiste du sionisme, ce
sont des communautés de travailleurs
qui ont à voir avec les phalanstères
des premiers socialistes et avec les
soviets de l’URSS.
1948 la naqbah
C’est sous
ce vocable (naqbah signifie
catastrophe) que les Palestiniens
désignent l’arrivée et l’installation
des colons se réclamant du peuple juif.
Armés en sous-main par la puissance
coloniale britannique ils conquirent le
territoire. Les "descendants des
hébreux" s’installèrent là où,
depuis des siècles (au moins le Vème de
notre ère) vivait une population
autochtone arabe, descendant de
Bédouins sédentarisés, les
Palestiniens. Au vrai, leur sort
n’intéressait déjà personne : le
retrait en 1948 des Britanniques fit
que les colons futurs israéliens
affrontèrent les royaumes d’Egypte et
de Jordanie qui voulaient eux aussi
annexer des territoires. Mais, au
passage, ils massacrèrent un peu la
population locale, comme ce fut le cas
au village de Deir Yassin, un véritable
Oradour (maison brûlées avec les
occupants à l’intérieur) où s’illustra
le futur premier ministre du Likoud
Menahem Begin.
Egypte et
Jordanie, malgré leur défaite gagnèrent
l’une la bande de Gaza et l’autre la
Cisjordanie. L’Etat israélien comprit
77 % de l’ancien protectorat
britannique au lieu des 53 % prévus par
l’ONU. Il y avait 700 000 colons
pour 900 000 Palestiniens, les
dirigeants israéliens organisèrent donc
l’expulsion. Outre une partie de la
bourgeoisie palestinienne qui avait fui
avant les combats pour se réfugier en
Jordanie ou en Arabie, les opérations
militaires officielles et celles de
l’Irgoun (l’organisation de Begin)
provoquèrent directement ou non le
départ de 400 000 réfugiés.
Reconnu par
l’ONU, l’Etat d’Israël put commencer à
vivre. Si l’URSS fut l’un des pays à
reconnaître "l’Etat hébreu"
il faut peut-être y voir la
connaissance des liens anciens de Ben
Gourion avec le socialisme, mais
surtout une méfiance envers les élites
arabes s’expliquant par leur attitude
vis-à-vis du nazisme. Le coup d’Etat de
1941 en Irak, mené par Rachid Ali
contre le roi, marionnette des
Britanniques, avait été largement
appuyé par l’Axe. Le futur dirigeant
égyptien Anouar El-Sadate et le Grand
Mufti de Jérusalem, un Palestinien,
étaient des agents stipendiés de l’Abwehr
nazie.
Pourtant,
très vite, l’Etat d’Israël adopta la
position qui est la sienne
aujourd’hui : premier lieutenant
de l’impérialisme US au Proche Orient.
Le nationalisme
arabe
Avec la
perspective de décolonisation,
plusieurs organisations politiques vont
voir le jour en Egypte, en Syrie, au
Liban, en Irak, au Yémen ; le
nationalisme arabe. Il s’agit d’un
courant laïque qui s’organisa sous
différentes formes durant les années 50
et 60, prit le pouvoir aux
représentants de la bourgeoisie
compradore (celle qui se couche devant
l’Impérialisme) à l’issue d’un
soulèvement armé et qui représentait
telle ou telle frange de la bourgeoisie
locale, favorable à l’indépendance.
Souvent, des officiers supérieurs ou
généraux en furent les figures de proue
(Nasser en Egypte, Kadhafi en Libye,
Kassem en Irak, etc…). Un cas
particulier est représenté par le parti
Baas qui rayonna sur l’Irak, ancienne
colonie anglaise, et la Syrie, ancienne
colonie française.
La plupart
de ces dirigeants arabes furent
soutenus par l’Union Soviétique, et,
une fois la libération nationale
acquise, procédèrent à des
nationalisations (canal de Suez en
Egypte, pétrole en Libye et en Irak).
La Syrie baasiste d’aujourd’hui, comme
l’Irak dirigé par Saddam Hussein en son
temps, possède toujours la santé et
l’éducation gratuites.
Pour autant,
on aurait tort d’oublier que ces
mouvements n’étaient pas des partis
ouvriers et que, souvent, une fois leur
pouvoir assis, ils se débarrassèrent
des communistes. Le parti communiste
égyptien, qui s’était auto-dissous et
avait rejoint l’Union Socialiste Arabe
de Nasser, représentant de la petite
bourgeoisie, promu par l’armée, vit ses
anciens dirigeants emprisonnés par
Sadate, encore un officier, mais issu
d’une famille de la grande bourgeoisie,
et définitivement interdits par
Moubarak, un autre officier, mais
surtout l’homme des milieux d’affaire.
Le général Nemeiry au Soudan en 1971 et
le Baas irakien de Saddam Hussein en
1976 se débarrassèrent dans un bain de
sang des communistes qui participaient
au pouvoir et des militaires marxistes.
Les
dirigeants de ces pays s’engagèrent
dans le combat contre l’Etat d’Israël
pour défendre les droits des
Palestiniens, au nom d’une unité du
peuple arabe qui était l’un de leurs
ciments idéologiques. Ainsi, en 1967,
lors de la guerre des six jours, des
soldats irakiens vinrent combattre aux
côtés des Jordaniens et des Yéménites
aux côtés des Egyptiens.
Malheureusement, ils oublièrent bien
vite la solidarité avec le peuple
martyr. En particulier, en 1970, ni le
contingent militaire irakien présent
sur place, ni l’armée syrienne située à
quelques dizaines de kilomètres, ne
bougèrent le petit doigt pour empêcher
le fameux "septembre noir",
le massacre des Palestiniens par la
garde du roi de Jordanie Hussein, valet
des impérialistes s’il en fut. Hafez
El-Assad, qui commandait l’armée
syrienne était plus occupé par sa
volonté de renverser Salah Jedid et la
frange marxiste du Baas qui était au
pouvoir depuis 1966, ce qu’il fit en
novembre 1970.
Enfin,
opposés aux colonisateurs et soutenus
par l’URSS, les mouvements
nationalistes arabes furent approchés
par les USA, du temps où les pays
socialistes existaient et choisirent
souvent leur "protection".
Des conseillers militaires US furent
présents, de l’Egypte de Sadate au Soudan
de Nemeiry et même dans l’Irak de
Saddam.
Les Palestiniens
et l’OLP
Après la
guerre des six jours (1967),
300 000 Palestiniens
supplémentaires quittèrent leur pays,
auxquels il faut ajouter 100 000
Syriens quittant le Golan conquis par
Israël. Il faut bien comprendre que
cette volonté d’expulsion est
consubstantielle de l’existence
d’Israël. Voici ce qu’en disait en 2004
l’historien israélien Benny Morris qui
a mis à jour la responsabilité de Ben
Gourion dans l’expulsion des
Palestiniens en 1948 : « Ben
Gourion était transfériste. Il avait
compris qu’il ne pourrait pas y avoir
un État juif au beau milieu d’une
minorité arabe hostile. Un tel État
n’existerait pas. Il ne serait pas en
capacité d’exister. [...] Ben Gourion
avait raison. S’il n’avait pas fait ce
qu’il a fait, jamais un État n’aurait
réussi à exister. Que ce soit clair. On
ne peut y échapper. Sans le
déracinement des Palestiniens, un État
juif ne serait pas né ici. [...] Rien
ne justifie les expulsions ou les
combats. Il en résulte des crimes de
guerre. Mais dans certaines conditions,
les expulsions ne sont pas des crimes
de guerre. Je ne pense pas que les
expulsions de 1948 étaient des crimes
de guerre. On ne fait pas d’omelette
sans casser des œufs. On doit se salir
les mains. [...] Mon sentiment est que
cet endroit serait plus calme et
connaitrait moins la souffrance si
l’affaire avait été résolue une fois
pour toutes, si Ben Gourion avait
effectué une expulsion importante et
s’il avait nettoyé tout le pays - toute
la terre d’Israël, jusqu’au fleuve du Jourdain ».
Son discours a le mérite de la clarté.
Les
Palestiniens réfugiés et leurs
descendants sont présents dans beaucoup
de pays arabes (2 millions en Jordanie,
500 000 au
Liban, en Syrie et en Arabie Saoudite
(mais ce sont essentiellement des gens
de la bourgeoisie). On estime le nombre
des réfugiés aujourd’hui à plus de 5
millions. Israël refuse avec
acharnement toute idée de retour ;
d’ailleurs une loi sur la propriété des
absents en 1948 a permis la saisie des
biens des Palestiniens.
Plusieurs
mouvements politiques palestiniens
furent créés : le Fatah, qui
s’inscrivait dans le courant
nationaliste arabe, le FPLP et le FDLP
qui sont tous deux
marxistes-léninistes. Ces
organisations, à la fois politiques et
militaires créèrent en 1967 l’OLP qui
devint à partir de 1969 et l’arrivée à
sa tête de Yasser Arafat l’organisation
qui fédérait la résistance
palestinienne. L’OLP en exil s’appuyait
sur deux revendications :
*La
revendication immédiate : retour
des réfugiés (et de leurs descendants)
et l’application de la résolution 242
de l’ONU. Celle-ci que beaucoup de
servants des impérialismes ont voulu
faire oublier spécifiait en 1967 après
la Guerre des Six Jours l’obligation
pour Israël d’évacuer les territoires
occupés : la Cisjordanie, la Bande
de Gaza et Jérusalem est.
*La
revendication à long terme :
l’établissement d’un état unique laïque
à la place de l’Etat juif, ce qui
sous-entendait le refus de reconnaître
l’existence de l’Etat d’Israël. Il faut
cependant bien se comprendre :
être favorable à la disparition de
l’Etat d’Israël ne signifie pas vouloir
massacrer ou rejeter à la mer ses
habitants, mais le refus de l’existence
d’un Etat théocratique, donc raciste.
D’ailleurs, l’assemblée générale de
l’ONU avait même condamné le sionisme
comme représentant « une forme de
racisme ».
www.sitecommunistes.org
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