N° 811 du 06:03:2023 Le Point sur la lutte contre la réforme des retraites (préparation de la mobilisation le 7 mars ; la question de la reconductibilité des grèves).

2 caractéristiques :
⁕ Rarement un mouvement social a démarré aussi fort.

Dès le début, la mobilisation a atteint un niveau supérieur à celui des luttes précédentes contre les réformes des retraites. Record reconnu par le journal Le Figaro : « l'opposition au projet de réforme de 2023 démarre sur les chapeaux de roues, avec une mobilisation supérieure, lors de la première journée, aux équivalents des précédentes réformes des retraites. Le nombre de manifestants était même 12% plus important qu'en 1995, et 39% plus élevé qu'en décembre 2019 ».
La réforme des retraites sert de catalyseur à une multitude de colères accumulées depuis plusieurs années : les salaires, les conditions de travail, la précarité, le coût de la vie, l’inflation, les hauses des prix de l’énergie, des produits alimentaires, la destruction des services publics. La bataille des retraites est liée étroitement à la lutte pour les salaires. Les journées de grèves et de manifestations montrent que le mécontentent et la volonté d’action grandissent et pas seulement sur la réforme des retraites, c’est de plus en plus largement la politique mise en œuvre par Macron qui est rejetée.
Malgré l’ampleur des manifestations, malgré le fait que l’opposition à la réforme progresse régulièrement, le gouvernement déroule son programme en exploitant tous les ressorts de la constitution pour imposer une réforme insupportable pour les salarié(e)s, les jeunes et les retraité(e)s, mais indispensable pour augmenter les profits des capitalistes. E. Borne qui s’est entremise auprès des sénateurs LR espère pouvoir compter sur eux pour que la retraite soit avalisée. Cela fait quatre ans que la droite sénatoriale porte un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour reculer l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Au Palais du Luxembourg, on estime que 80 % de la proposition sénatoriale a été reprise dans le texte du gouvernement(1).
En février, l’intersyndicale a appelé à durcir le mouvement en mettant « la France à l’arrêt le 7 mars » et à faire du 7 une « véritable journée morte dans les entreprises les administrations, les services, les commerces, les écoles, les lieux d’études, les transports… à participer massivement aux manifestations à se déclarer en grève ». 68 % des personnes interrogées estiment que le blocage de la France sera de la responsabilité du gouvernement.
La CGT a appelé à mettre tout en œuvre pour préparer un 7 mars plus fort pour mettre la France à l’arrêt dans tous les secteurs professionnels, la question de la reconduction de la grève est posée, y compris par des débrayages quotidiens dès le 7 mars. De nombreux secteurs construisent dès maintenant la reconductibilité des luttes. Les secrétaires généraux de cinq fédérations CGT représentant des secteurs stratégiques - cheminots, industrie chimique, mines et énergie, ports et docks, verre et céramique-, ont annoncé depuis le début février, leur décision d’aller vers une grève reconductible, jusqu’au retrait du projet gouvernemental (cf. hebdo n° 810, Un mouvement d’ampleur et long)
Le ministre du Travail Olivier Dussopt a assuré dimanche sur le plateau de "BFM Politique" que le gouvernement n'abandonnera pas son projet de réforme des retraites, malgré l’appel des syndicats à la mobilisation le 7 mars. Rien n’est moins sûr.
C’est bien dans la rue et par les grèves que l’on pourra faire reculer le gouvernement. Ce sont les travailleurs qui créent les richesses, le blocage de la production et la grève reconductible font perdre des millions d’euros chaque jour au capital, un jour de grève nationale et générale représente un coût proche de 2 milliards d'euros, bloquer l’économie par des grèves reconductibles pour toucher aux profits des entreprises capitalistes c’est ce que craignent le gouvernement et le Medef.
La situation économique et sociale s’aggrave.
Hausse de l’inflation qui atteint, selon l’Insee, 6,2% en février, soit 0,2 point de plus que le mois précédent. Les produits alimentaires eux ont augmenté de 14,5% en un an, la progression est particulièrement marquée pour les produits frais, 15 % pour la viande et près de 20 % pour le lait, le fromage et les œufs. La hausse des prix pèse lourdement sur les familles
→ Selon une enquête, réalisé par Cofidis, 510 € est la somme moyenne qui manque chaque mois à 54% des Français pour vivre convenablement, montant jamais atteint depuis 2014.
→ Sept Français sur dix ont changé leurs habitudes de consommation en 2022 : baisse du chauffage, réduction de l'usage de la voiture, recherche de prix bas ou de promotions (59 %) ou encore l'achat de produits de seconde main (24 %). Un grand nombre de Français ont réduit leurs dépenses sur les vêtements ou les chaussures (48 %), les loisirs (42 %), les vacances (40 %), priorisant les dépenses liées à l'alimentation, à l'énergie et à la santé.
→ 77 % des personnes retraitées interrogées déclarent devoir se restreindre sur des postes de dépenses essentielles et en particulier les dépenses alimentaires.
→ le Smic ne permet pas d’atteindre un niveau de vie minimum décent
→ 50 % des personnes accueillies par les Restos du cœur ont moins de 25 ans. Les étudiants sont de plus en plus nombreux à se rendre aux distributions. Fin 2022, 2,4 millions de personnes étaient accueillies par les banques alimentaires, soit trois fois plus qu'il y a dix ans. La quasi-totalité (94 %) vivent sous le seuil de pauvreté, les « travailleurs pauvres » sont de plus en plus nombreux (17 % du total). Les deux tiers des personnes accueillies ont un travail à temps partiel. Les personnes en CDI représentent 60 % des travailleurs, en hausse de 4 points sur un an.
Pouvoir d’achat en baisse, l’OFCE (Observatoire Français des conjoncture économiques) prévoit que le pouvoir d’achat des Français aura baissé entre fin 2021 et fin 2023 entre 1,2 % et 2 %. Il reviendrait à son niveau de fin 2019, ce qui signifie qu’il aura stagné pendant quatre ans. Les « Français modestes » ont davantage perdu en niveau de vie, pour eux il a baissé de 3,5 %(2) .
Fermetures d’entreprises Selon la Banque de France, plus de 41 000 défaillances d'entreprises ont été recensées en 2022, en hausse de 48,7 % par rapport à 2021. Avec la fin des aides et dans un contexte de hausse des taux d'intérêt, avec les prix de l'énergie élevés et le ralentissement économique, un net rebond du nombre de défaillances d'entreprises est attendu en 2023. Selon le leader de l'assurance-crédit Allianz Trade, il pourrait progresser en France de plus de 51,6% pour atteindre le nombre 59 000.
Chaque semaine ou presque une enseigne iconique fait les gros titres : Camaïeu, licenciement de 2100 salariés ; vingt-six magasins des Galeries Lafayette mis sous sauvegarde du tribunal de commerce ; Kookaï en redressement judiciaire ; Go Sport et Gap France à la recherche de repreneurs, San Marina (fabrication de chaussures les accessoires de mode) en liquidation judiciaire : 163 magasins fermés, 600 salariés licenciés…
Santé et sécurité sociale le budget des hôpitaux adopté par la voie du 49.3, augmente moins que l’inflation, ce qui signifie une baisse des moyens, donc des fermetures de lits et d’hôpitaux. La réponse de François Braun : « il y aurait trop de services d’urgences en France ». Il ne reste aujourd’hui que 630 services d’urgence dont 505 dans le public et le secteur non lucratif et 125 dans le privé lucratif. De nombreux sites ont été fermés ces dernières années. Une étude de l’Association des maires ruraux de France décrit une situation qui s’aggrave avec 10 % de la population, soit 6 millions d’habitants qui vivent à plus de 30 minutes d’un service d’urgences. Aujourd’hui, le nombre de services en difficulté pour assurer une ouverture 24 h sur 24, 365 jours par an est évalué à près de 150. Ce sont ces structures qui sont dans le collimateur du ministre.
Les entreprises jouent à fond la rentabilité financière. Les bénéfices nets annuels cumulés des entreprises du CAC 40 s’élèvent à 107,4 milliards d’euros après les publications de Safran et Hermès, alors que seulement 24 des 40 groupes ont publié leurs résultats. En 2021, ces 24 entreprises avaient collectivement dégagé 96,3 milliards d'euros de bénéfice, sur plus de 156 milliards d'euros pour l'ensemble du CAC 40.
Résultats publiés en pleine lutte contre la réforme des retraites dont une des justifications fallacieuses vise à trouver 18 milliards d'euros d'économies d'ici à 2030 pour équilibrer le régime, soit une paille par rapport aux milliards qu'ont gagné l'an dernier les grandes entreprises. Trois multinationales françaises : LVMH, BNP Paribas et TotalEnergies affichent pour 2022 des bénéfices à onze chiffres.
Situation internationale
La concurrence internationale s’exacerbe entre les capitalistes pour la conquête des marchés, pour l’exploitation des ressources sur l’ensemble de la planète, le pétrole, les minerais, les métaux rares, les terres rares…. Partout dans le monde, du Grand Nord à l’Afrique, à l’Asie…
C’est une concurrence féroce, sans merci, qui va jusqu’à la guerre, comme en Ukraine, comme en Irak, en Afghanistan (très riche en minerai), au Moyen-Orient, dans les pays d’Afrique, d’autant plus que le développement considérable des pays d’Asie, la Chine, L’Inde, en particulier modifie l’équilibre du monde capitaliste.
En 1990, après la disparition de l’URSS et des pays socialistes de l’Est européen, tous les chantres du capitalisme, en France et ailleurs, avaient promis la paix et la prospérité dans le monde entier.
Nous voyons ce qu’il en est.
Développement des luttes. L’inflation, la baisse des salaires plongent dans la précarité les travailleurs, les jeunes, les retraité(e)s les plus vulnérables alors que dans le même temps les profits des capitalistes explosent. Les luttes, des grèves portant sur les salaires, les augmentations de salaires, les conditions de travail se multiplient, mobilisant un nombre important de secteurs. Au Portugal : journées de grèves massives dans l’enseignement public, la santé et le transport ferroviaire (552 trains annulés sur 557). Au Royaume Uni, depuis le mois de décembre, ce sont des mouvements de grève records qui voient le jour : les transports, avec le métro londonien, les télécoms, les postiers, les infirmiers. En Espagne Un million de personnes à Madrid pour la défense de l’hôpital public. En Belgique : blocage des centres de tri wallons contre la transformation de l’entreprise postale en une société internationale d’e-commerce.
L’Europe comme le monde est dominé par le capitalisme qui applique partout la même politique pour accroître ses profits : la surexploitation. Les luttes sont le seul moyen pour le faire reculer (cf. la rubrique internationale et le résumé économique et social de l’hebdo).
L’activité du Parti
Dans la dernière période concernant la lutte contre la réforme des retraites et pour l’augmentation des salaires nous avons mis à la disposition du parti des tracts et des journaux qui ont été diffusés lors des manifestations et dans les entreprises, ils ont été particulièrement bien accueillis. Notre brochure « Guerre en Ukraine : une étape dans la montée vers un conflit plus large au sein du système impérialiste » a connu un vrai succès le tirage est pratiquement épuisé.
Dans la prolongation de notre initiative célébrant la victoire du peuple algérien sur l'impérialisme français, comme nous l’avons proposé à un précédent CN, une brochure comprenant les différentes interventions de participants à cette initiative est prête pour l’impression.
La remise des cartes est bien avancée.
Le renforcement de notre influence, notre développement, le renforcement du parti est la question centrale de notre action politique. De plus en plus nombreux sont celles et ceux qui sont à la recherche d’une solution qui réponde à leurs préoccupations. Comment nous rapprocher encore mieux de ces salariés qui subissent les durs effets de cette politique, de ces jeunes à l’avenir gravement menacé par cette politique ?
Il nous faut poser très fortement la question des moyens financiers à tous, adhérents, sympathisants, proches, collègues de travail.
Cette année 2023 est celle de notre congrès qui se tiendra les 16 et 17 juin au CIS Kellermann.
Une commission préparera le document politique qui servira de base à la discussion et qui sera présenté au prochain CN (du 25 mars), ainsi qu’un Appel, qui lui sera discuté et voté lors du congrès.
Comme il a été décidé au CN de décembre, nous reverrons les statuts pour qu’ils répondent bien à nos objectifs.
Je vous rappelle les dates des BN et des CN jusqu’au congrès : CN 25 mars, BN 15 avril, CN 13 mai, congrès 16 et 17 juin

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(1) Cf Hebdo n° 810 « Un mouvement d’ampleur et long"

(2) Cf le journal L’Opinion 23 février 2023.