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N° 795 16/11/2022 Sommets de l'ASEAN et du G20Le sommet de l'ASEAN vient de se tenir à Phnom Penh (Cambodge) et celui du G20 se tient à Bali (Indonésie).

La tenue de ces deux sommets en Asie, témoigne du rôle croissant économique, politique et militaire que joue l'Asie dans les rapports internationaux . La présence à ces deux sommets du Président des États-Unis J. Biden et celle du Président chinois Xi Jinping au G20 est révélatrice des enjeux que représente cette région pour les puissances impérialistes majeures. Nous avons déjà souligné cette dimension fondamentale dans l'évolution des rapports de forces au plan international . Si la guerre en Ukraine masque momentanément cette réalité, le journal Le Monde le rappelle dans un article du 8 juin 2022 : "Pour les États-Unis il n'est pas question de laisser Poutine les détourner de leur principal objectif stratégique: l'endiguement de la Chine".

Au sommet de l'ASEAN, J. Biden, présent comme invité, n'a pas manqué de souligner l'intérêt des États-Unis, de leur présence et de leur influence dans la région en proposant un nouveau pacte entre l'ASEAN et les USA, permettant selon ses dires : " de construire un indo-pacifique libre et ouvert". L'année dernière, la Chine et l'ASEAN ont annoncé un renforcement de leurs liens dans le cadre d'un partenariat stratégique global. Les deux puissances majeures de la région sont donc bel et bien à la manœuvre dans la guerre d'influence qu'elles se mènent! La proposition de J. Biden a reçu une cinglante réponse de S. Lavrov Ministre des affaires étrangères, représentant de la Fédération de Russie, accusant les États-Unis de : "vouloir militariser la région pour contenir la Chine" ajoutant " Les États-Unis et leurs alliés et l'OTAN essayent de conquérir l'Asie-Pacifique". Si l'orientation de la politique américaine, suivie en cela par ses alliés, y compris la France, de considérer la Chine comme un ennemi systémique, est fondée, ce qui est réellement en jeu, c'est l'exacerbation des conflits au sein de l'impérialisme avec un pôle encore dominant, mais déclinant que sont les États-Unis et un pôle, celui de la Chine et de ses alliés, qui entend asseoir son hégémonie au détriment du premier.
Le sommet du G20 a été marqué par la longue rencontre entre les Présidents chinois et américain. Les contentieux entre les deux plus grandes puissances impérialistes mondiales sont nombreux et les restrictions et sanctions américaines vis-à-vis de l'économie de la Chine sont perçues, à juste titre, par cette dernière comme une volonté de concurrence commerciale déloyale et un frein au développement des échanges mondiaux. Si rien n'a avancé sur ce plan, il faut quand même noter un début d'apaisement avec l'engagement de rencontres ministérielles bilatérales sur les dossiers faisant l'objet de conflits. À propos de Taïwan, qui a fait l'objet d'une escalade insistante de la part des États-Unis avec en particulier la visite provocatrice, dans l'île, de N. Pelosi , Présidente de la Chambre des Représentants, J. Biden a réaffirmé la position des USA, affirmant "qu'elle n'avait pas changé", suivant en cela le principe d'une "Chine unique". Xi Jinping avait de son côté mis en garde son interlocuteur sur le fait que : " Quiconque cherche à séparer Taïwan de la Chine violera les intérêts fondamentaux de la Chine".
Si la question de la guerre en Ukraine n'apparaît pas comme avoir été abordée, les deux dirigeants ont fait une claire mise en garde contre l'utilisation d'armes atomiques.
Le premier bilan de ce sommet qui se poursuit, est que les questions de fond liées à la concurrence féroce que se mènent les grands monopoles et les États dans cette région du monde, semblent vouloir marquer une pause...mais, n'est-ce pas pour mieux sauter!


1Association des Nations de l'Asie du Sud-Est. L'ASEAN a été fondée par cinq États, principalement de l'Asie du Sud-Est maritime : Philippines, Indonésie, Malaisie, Singapour, Thaïlande, le Brunei, le Vietnam, le Laos, la Birmanie et le Cambodge. Cette organisation représente 620 millions d'habitants, 8,8% de la population mondiale.
2 Le G20 comprend les 20 premières économies mondiales : Argentine, Afrique du Sud, Allemagne, Arabie Saoudite, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, États-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie et Union Européenne. en 2017, le G20 représente 85 % du PIB mondial pour 63 % de la population mondiale.
3 Le congrès de l'APEC (Asia Pacific economic cooperation - Coopération économique Asie Pacifique) se tiendra à Bangkok à partir du 16 novembre
4 Étaient également présents au sommet de l'ASEAN les Premiers ministres du Japon, d'Australie et de Corée du Sud
5 Le centre des affrontements au sein de l’impérialisme se déplace vers la zone Asie- Pacifique
6https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/monde/1460-le-centre-des-affrontements-au-sein-de-l-imperialisme-se-deplace-vers-la-zone-asie-pacifique
7 Taïwan: Risque d'ouverture d'un nouveau front dans les affrontements au sein de l'impérialisme.
https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/asie/1965-taiwan-risque-d-ouverture-d-un-nouveau-front-dans-les-affrontements-au-sein-de-l-imperialisme

Des luttes là et ailleurs!

Nous évoquions récemment (Hebdo 794) les multiples « grèves de la colère » au Royaume-Uni mais la situation de tous les salariés d’Europe est similaire. Selon une enquête IPSOS, 64 % des Européens disent ne plus savoir « sur quelles dépenses faire des compromis ». Car ils ont beau se serrer la ceinture, les citoyens des 27 voient leur pouvoir d’achat diminuer et les factures augmenter. Une riposte sociale monte dans tous les pays de l’Union européenne. Les appels à la grève et les manifestations se multiplient. « Du jamais vu », pour Philippe Pochet, directeur général de l’institut syndical européen.
Scénario identique en Belgique, où la hausse des prix est supérieure à la moyenne de la zone euro (plus de 12% en octobre sur un an) et où le gouvernement refuse de plafonner les prix de l'électricité. La Fédération générale du travail de Belgique (FGTB), premier syndicat de Belgique et moteur de la contestation, a aussi appelé à "modifier de toute urgence la loi sur la norme salariale", qui fixe un cadre jugé bien trop contraignant dans les négociations nationales sur les salaires avec le patronat. "On demande de pouvoir négocier des augmentations salariales là où c'est possible", a fait valoir à l'AFP François Reman, porte-parole du syndicat chrétien Confédération des syndicats chrétiens (CSC), citant les secteurs de la finance, de l'énergie et de la chimie. Le patronat répond que la compétitivité des entreprises est déjà menacée par les coûts de l'énergie. Le Premier ministre belge Alexander De Croo a appelé les syndicats à "montrer un peu d'empathie avec les employeurs qui paient" ces factures. Il ne mentionne pas la forte augmentation de l’excédent brut d’exploitation fait que les résultats d’exploitation battent tous les records. Au cours du premier trimestre de 2022, les sociétés non financières en Belgique ont gagné plus de 35 milliards d’euros. La valeur ajoutée produite a augmenté de plus de 3 % par rapport au dernier trimestre 2021. Les entreprises ont reçu près de 3 milliards d’euros de subventions de plus que les impôts qu’elles étaient tenues de payer. Grève sur le rail belge : un nouveau préavis pour le 30 novembre et le 1er décembre s'ajoute à celui du 29 novembre. A Bruxelles, les syndicats ont préféré multiplier les "piquets de grève" plutôt que d'organiser un grand défilé. Pas comme à Athènes.
A l'inverse de la Grèce où à Athènes où une manifestation a rassemblé dans la matinée près de 20 000 personnes selon la police. Athènes, où services publics et entreprises étaient affectés mercredi par une journée de grève nationale. En Grèce, aucune liaison maritime n'était assurée entre le continent et les îles de la mer Egée (Est) et Ionienne (Ouest) en raison de la participation du syndicat des marins (PNO) à la grève, la deuxième depuis le début de l'année contre la baisse du pouvoir d'achat. L'inflation a dépassé la barre de 10% lors des six derniers mois dans ce pays, et même atteint 12% en septembre sur un an. Le prix du gaz a quant à lui plus que quadruplé (+332%).
En Espagne le 13 novembre 650 000 personnes ont manifesté à Madrid pour défendre le système public de santé contre le plan du gouvernement qui veut privatiser le service de santé. Une grève est organisée, à l’appel de 5000 médecins, le 21 novembre dans les services d’urgence pédiatrique pour protester contre la dégradation des conditions de travail, le manque des personnels et de moyens.
En Allemagne, les manifestants sont descendus nombreux dans la rue malgré l'annonce du gouvernement qui a promis début septembre 65 milliards d’euros pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages face à la flambée des prix. Ils demandent eux aussi des augmentations de salaires. Des débrayages coordonnés à durée limitée ont lieu depuis plusieurs semaines, les représentants des patrons et des salariés mènent des négociations sur les salaires, qui ont échoué, selon IG Metall. Un mouvement de grève a duré deux semaines dans le secteur de la sidérurgie. Près de 68.000 salariés de cette branche ont bénéficié, à la suite de ce mouvement, d'une augmentation de 6,5%, soit la plus forte "hausse depuis 30 ans", selon IG Metall.
Grèves en Iran, les protestations et grèves entrent dans leur 6e semaine
Le média en ligne 1500 tasvir a fait état de "grèves (...) organisées dans des villes, dont Sanandaj, Bukan et Saqez (nord-ouest)". Il a aussi parlé de commerçants en grève dans ces mêmes villes, ainsi qu'à Marivan (ouest). A Tabriz, capitale de la province de l'Azerbaïdjan oriental, des dizaines de travailleurs se sont rassemblés devant une chocolaterie, d'après d'autres vidéos qui n'ont pas pu être vérifiées dans l'immédiat par l'AFP. Des étudiants ont protesté dans plusieurs universités du pays, a indiqué 1500 Tasvir, citant la Faculté des arts et d'architecture de Yazd (centre), l'université de Téhéran, l'université Allameh Tabatabai, dans l'est de la capitale, l'université Razi à Kermanshah (nord-ouest), ainsi que celles de Hamedan (ouest), Ahvaz et Yasouj (sud-ouest).Un syndicat d'enseignants a par ailleurs appelé à une grève nationale dans le pays dimanche et lundi pour dénoncer la répression qui, selon Amnesty International, a coûté la vie à au moins 23 enfants. Les Iraniennes, beaucoup tête nue, ont été à l'avant-garde du mouvement de contestation, chantant des slogans contre le pouvoir et affrontant les forces de sécurité.
En Tunisie, la grève des enseignants contractuels secoue l’école primaire. Depuis la rentrée, près de 4 000 professeurs ont cessé de travailler pour demander leur titularisation, conformément à un accord signé en 2018 avec l’ancien gouvernement.
Au Kenya, les pilotes de Kenya Airways devaient mettre fin, mercredi 9 novembre, à la grève lancée samedi, un tribunal ayant ordonné une reprise de l’activité après l’annulation de centaines de vols. « Nos membres doivent reprendre leurs fonctions » mercredi à 6 heures, a déclaré l’Association des pilotes de ligne du Kenya (Kalpa) dans un communiqué publié mardi soir. « Les membres de Kalpa feront de leur mieux pour rétablir la normalité des opérations », a déclaré le secrétaire général du syndicat, Murithi Nyagah, qualifiant les perturbations dans les voyages de « regrettables ». La Kalpa avait lancé ce mouvement de grève malgré une décision du tribunal des relations du travail de Nairobi du 31 octobre le déclarant illégal. Le transporteur a annoncé lundi qu’il mettait fin à sa reconnaissance du syndicat et qu’il se retirait de son accord de négociation collective, accusant la Kalpa d’ "exposer la compagnie aérienne à des dommages irréparables". Kenya Airways a enregistré une augmentation de 76 % de ses revenus !
En Afrique du Sud, un syndicat de fonctionnaires a entamé une grève jeudi, pour réclamer de meilleures hausses de salaires. Après des négociations, le gouvernement sud-africain a décidé d’imposer une augmentation de 3%, la première depuis 2018. Mais elle est très loin d’être suffisante, selon les grévistes. Ils se sont lancés dans un bras de fer avec le ministère des Finances. Plusieurs marches étaient organisées dans le pays à l’appel de la Public Servants Association (PSA), qui représente plus de 230 000 fonctionnaires. À Pretoria, les manifestants se sont rendus devant le département du Trésor. « Nous avons formulé une demande d’augmentation salariale de 10%, et l’employeur n’offre que 3%. Nous nous trouvons donc dans une impasse et nous avons ainsi déposé un préavis de grève pour pouvoir montrer au gouvernement que nous n’accepterons pas ces 3%, qui sont une insulte pour la classe laborieuse », s’indigne-t-elle.
Nous pourrions continuer notre tour du monde …alors que les gouvernements capitalistes ont dépensé des milliers de milliards pour renflouer les banques et les sociétés après le krach financier de 2008 et à nouveau en 2020 au début de la pandémie, il est « impossible » de même chauffer les maisons des travailleurs dans les pays les plus « riches » du monde pendant l’hiver.
Partout grèves et manifestations prennent de l'ampleur. Face à l'inflation et à la crise énergétique, aux conditions de travail, les manifestants demandent des augmentations de salaire, ils créent par leurs luttes un rapport de force qui contraigne leur patronat et leur gouvernement à satisfaire leurs revendications. La lutte permanente contre le système capitaliste jusqu’à l’abattre, seule solution pour changer totalement de politique et de société émerge dans chaque pays : « Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs chaînes. Ils ont le monde à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » écrivait K.Marx

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