N° 800 20/12/2022 Djibouti. Expulsion forcée du prisonnier et militant des droits de l'homme Salah Al-Hamouri. Notre regard sur la situation au Pérou

 

Djibouti Le communiqué concernant la protection des militants du Front pour la Restauration de l’Unité et la Démocratie à Djibouti a été proposé par nos amis de l’Association Française d'Amitié et de solidarité avec l'Afrique. Nous nous y sommes associés par notre signature.

Le Front pour la Restauration de l’Unité et la Démocratie
N’EST PAS UNE ORGANISATION TERRORISTE!

Ismaël Omar Guelleh qui a été réélu président pour un cinquième mandat en avril 2021 à l’issue d’un scrutin frauduleux, cherche à assurer le maintien de son clan au pouvoir avant l’échéance du mandat. Pour ce faire il muselle toutes les formes de résistance.
Le Front pour la Restauration de l’Unité et la Démocratie (FRUD), principale organisation d’opposition et artisan du rassemblement démocratique de 2021 est particulièrement visé par la dictature au pouvoir.
A Djibouti, le régime s’appuyant sur la présence de 5 bases militaires étrangères, se sent à l’abri de toute alternance politique.
Le FRUD, contraint à prendre les armes pour résister à l’oppression, ne s’est jamais attaqué aux populations civiles, il tente au contraire de les protéger.
C’est Ismaël Omar Guelleh qui sème la terreur!
A la suite de revers militaires, le chef de l’Etat a fait adopter par le parlement le 13 octobre 2022, une loi déclarant le FRUD, « mouvement terroriste ». Cette loi permet de légitimer les incarcérations, les tortures, voire les assassinats des militants du FRUD et de ses sympathisants. La répression du pouvoir, exercée sur la population qui lui est hostile, est une constante depuis 45 ans. Elle s’est accentuée ces dernières années et aggravée depuis l’adoption de la loi.
La Ligue Djiboutienne des Droits Humains a dénoncé des arrestations arbitraires au Nord et au Sud-ouest du pays, suivies de tortures et de nombreuses exactions à l’encontre des femmes.
La loi permet aussi de poursuivre à l’étranger les opposants qui dénoncent la véritable nature du régime inamovible. D’ores et déjà, un juge d’instruction de Djibouti a délivré des commissions rogatoires et décerné des mandats d’arrêts internationaux auprès d’Interpol. Mohamed Kadamy, Président du FRUD, ainsi que les autres dirigeants vivant en Europe et aux Etats-Unis sont particulièrement visés.
Ismaël Omar Guelleh avait déjà porté plainte en 2019 contre Mohamed Kadamy, réfugié politique en France depuis 2006. Sa mise en examen a été annulée par la justice française. Mais en 2020 et 2021 le dictateur a obtenu de l’Ethiopie l’extradition de Fouad Youssouf lieutenant de l’armée de l’air et de Barkat Abdoulwahab, activiste blogueur.
L’ensemble des forces progressistes et personnalités européennes et africaines signataires assurent le FRUD de leur entière solidarité et refusent cette tentative d’instrumentalisation d’Interpol et de la justice de pays, au service d’une dictature. De telles manipulations représentent un véritable danger pour les droits des oppositions à travers le monde.
Il est capital que la protection des démocrates du FRUD soit assurée et garantie.

Expulsion forcée du prisonnier et militant des droits de l'homme Salah Al-Hamouri par les autorités d'occupation israéliennes.

Salah Al-Hamouri qui était placé en détention administrative, une procédure qui permet l'incarcération sans motif ni jugement vient d'être expulsé vers la France. Il avait été incarcéré en Israël de 2005 à 2011 sous le fallacieux prétexte de complot. Ses défenseurs se battaient pour sa libération inconditionnelle. Son expulsion à la veille d'un changement de gouvernement sonne comme un avertissement à tous ceux qui combattent la politique de colonisation et d'apartheid menée par les autorités d'occupation israéliennes.
Il s'agit ni plus ni moins qu'une violation du droit international que l'on peut assimiler à une déportation et donc à un crime de guerre. Selon Amnesty International : " C’est une déportation. Les expulsions forcées et les détentions forcées sans charges, la séparation des familles participent au crime d’apartheid que nous dénonçons. Il y a une volonté d’hégémonie sur Jérusalem-Est. On expulse les gens qui ne font pas allégeance à Israël alors qu’en droit international, une population occupée n’a pas à faire allégeance à une population occupante". De son côté le ministère des affaires étrangères palestinien, considère qu'il s'agit :" de crime de guerre et de violation des règles du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire, ajoutant que l'arrestation et la déportation du prisonnier de Jérusalem Hammouri est une mesure arbitraire pour laquelle Israël doit être tenu responsable". Il ajoute en rappelant que : " l'autorité de colonisation et de l'apartheid, n'a aucune souveraineté sur aucune des terres de l'État de Palestine, en particulier à Jérusalem".
Notre parti en s'associant aux protestations contre cette expulsion illégale rappelle que la lutte pour les droits légitimes du peuple palestinien ont tout notre soutien. Il est grand temps que le pouvoir politique en France cesse les bavardages sur les droits de l'homme et agisse pour isoler les autorités d'occupation israéliennes en rompant les relations économiques, culturelles, scientifiques et diplomatiques avec cet État colonial et d'apartheid.

Notre regard sur la situation au Pérou

Que s’est-il passé ?
Les dernières élections générales, au Pérou, ont eu lieu en avril (législatives et premier tour des présidentielles) et juin 2021 (second tour des présidentielles). Ce couplage des élections est une règle générale : en cas de dissolution, ou de démission ou destitution du président, le rôle des suivants est de terminer le mandat : ainsi, le congrès (parlement unicaméral) élu lors des législatives anticipées de 2020 n’a tenu qu’un an, terme du mandat du précédent congrès dissout.
La particularité de cette élection est d’avoir envoyé une nette majorité de forces conservatrices (centre, droite en tous genres) au Congrès et d’avoir permit l’élection d’un président, Pedro Castillo, très marqué à gauche.
Il faut toutefois se méfier du qualificatif de gauche, Castillo est souvent qualifié de marxiste, de même que le parti qui l’a soutenu, Pérou Libre. En France, beaucoup de journalistes qualifient de « gauche radicale » la France Insoumise, qui n’est que l’avatar actuel de la social-démocratie. Il en est de même au Pérou et plus généralement en Amérique latine.
Le président Castillo n’a pas appliqué du tout son programme, notamment la tenue d’une assemblée constituante et la réforme agraire, il a nommé des gouvernements de plus en plus ouverts à droite pour composer avec le parlement, et quand il a annoncé le report à mai 2023 de l’augmentation générale des salaires, la police a réprimé les manifestants. Si le parti « Pérou libre » compte effectivement quelques sympathisants du marxisme-léninisme, il est également composé de gens de la gauche bon teint.
Les efforts de Castillo pour s’entendre avec une partie des réactionnaires (même son premier gouvernement, le plus à gauche, a été validé par 73 députés sur 130, alors que centre et droite en comptent 85) n’ont pas satisfait les parlementaires, qui ont cherché à plusieurs reprises à le destituer, soit pour corruption, soit pour trahison. La corruption, au Pérou, semble à la fois un mal endémique qui touche les politiciens et un prétexte facile pour écarter un adversaire. La Grande Bourgeoisie tient tous les pouvoirs, les media, la justice, l’armée et le Parlement.
Certains sbires de la Grande Bourgeoisie, surtout en Amérique latine, s’inquiètent de vite de supposées menaces révolutionnaires. C’est ce qui explique l’acharnement de ce parlement contre le président Castillo, tout social-démocrate qu’il soit. Castillo a donc été poussé à la faute. Ila dissout le Parlement, alors qu’il n’en avait pas le droit, il ne pouvait le faire que si ce même parlement avait refusé deux fois de suite d’investir un gouvernement, ce qui n’était pas le cas.
La suite n’a pas tardé. Le Parlement a démis le président avec une majorité de 101 voix, comprenant des députés de « Pérou libre ». La vice-présidente, élue avec lui, Dina Boluarte a été investie présidente à sa place, et il est détenu sans procès dans les locaux de la préfecture de Lima. A la suite de sa tentative de dissolution, les rats ont quitté le navire : une dizaine de ministres a démissionné, la future nouvelle présidente avait alors dénoncé la tentative de « coup d’Etat » de son désormais prédécesseur, qui « aggrave la crise politique et institutionnelle que la société péruvienne devra surmonter en respectant strictement la loi ».

Les réactions des gouvernements de la région et d’ailleurs
Les parangons de la démocratie, qui se mêlent souvent des affaires des pays qui, normalement, ne les regardent pas, n’ont pas manqué d’exprimer leurs pressions. L’ambassadrice états-unienne à Lima, Lisa Kenna, l’avait exhorté à se conformer « à la Constitution ». A l’issue du vote des parlementaires, la diplomatie américaine a immédiatement fait savoir qu’elle ne considérait plus Pedro Castillo comme le président du pays en exercice. « Nous saluons les institutions péruviennes et les autorités civiles pour avoir garanti la stabilité démocratique et nous continuerons de soutenir le Pérou et son gouvernement d'union que la présidente Boluarte a promis de former ». L’Espagne, qui se mêle encore bien trop souvent du sort de ses anciennes colonies n’a pas été en reste. Le gouvernement espagnol, dirigé par le socialiste Sanchez, qui avait « fermement condamné la rupture de l’ordre constitutionnel au Pérou » s’est félicité « du rétablissement de la normalité démocratique ». Enfin, la nouvelle présidente est également soutenue par l'Union européenne, qui salue son désir de « renforcer l'État de droit et les institutions démocratiques au Pérou ». Même Lula, pourtant président « de gauche » a laissé tomber Castillo. Il a annoncé trouver « toujours regrettable qu’un président démocratiquement élu subisse un tel sort », mais il s’est félicité que « tout ait été mené dans le cadre constitutionnel ».
Seuls les gouvernements de Colombie, Bolivie, Mexique et Argentine se sont solidarisés avec le président déchu. Evo Morales, ancien président bolivien, dénonce une « guerre hybride menée en Amérique ¬latine (…) pour persécuter, accuser et évincer les dirigeants qui défendent le peuple et affrontent les politiques néolibérales (qui génèrent) la faim ». Le président du Mexique, Andrés Manuel López Obrador, estime que Pedro Castillo a été victime des « élites économiques et politiques » du Pérou

La réaction des travailleurs péruviens
Depuis, de nombreux travailleurs manifestent tous les jours pour réclamer des élections générales tout de suite et la libération de Castillo. Le mot d’ordre « Qu’ils s’en aillent tous » résume la volonté des travailleurs, notamment du sud du pays, de balayer toute la clique réactionnaire et, avec, ceux comme Boluarte qui fraient avec elle. Le parlement a refusé d’approuver sa proposition d’avancer les élections à 2023, mais pourrait revenir dessus. Les manifestations sont réprimées par l’armée, elles ont déjà fait vingt morts et la présidente, refusant de discuter avec les forces populaires qui l’ont-elles aussi élue, refuse de démissionner.
On peut résumer ainsi les revendications immédiates des manifestants : « On veut la dissolution du Congrès, qu’ils s’en aillent tous, Dina Boluarte aussi, on ne l’a pas élue ! On veut la convocation d’une Assemblée constituante et de nouvelles élections immédiates. Des élections, mais pas avec les règles de l’extrême-droite. »
Et la contestation s’amplifie, elle a gagné, depuis lundi 12, 15 des 26 régions du pays. La grève générale de jeudi 15 a été un succès total. La liste des organisations qui ont appelé à une grève illimitée s’est élargie avec des syndicats agraires, des étudiants et des organisations indigènes. Les revendications sociales, pour l’augmentation des salaires, contre l’inflation, pour la réforme agraire, resurgissent au premier plan. Des agriculteurs, des enseignants, des mineurs, qui avaient le sentiment d’avoir trouvé un écho dans le gouvernement de Pedro Castillo, se considèrent floués par son départ, même si l’ancien président, lors de son court mandat de dix-sept mois, a été incapable de faire avancer les choses.

La réaction du Parti Communiste du Pérou et la nôtre
Le Parti communiste du Pérou soutient les manifestations, mais ne défend pas Castillo. Voici un extrait de son communiqué du 7 décembre : « L'ex-président de la République, Pedro Castillo, dans une mesure irresponsable, provocatrice et isolée des secteurs populaires, a déclaré, de manière illégale et opportuniste, la dissolution du Congrès. Le Parlement a procédé à son remplacement et il appartiendra à la vice-présidente, Dina Boluarte, de prendre la relève. Le bref, médiocre et corrompu gouvernement continuiste de Castillo n'a fait que renforcer les forces réactionnaires et conservatrices qui ont pris pied au Congrès de la République et dans les institutions judiciaires. Nous rejetons les tentatives de coup d'État des deux parties, qui ont, toutes deux, été largement délégitimées aux yeux de la population. La racine de la crise est plus profonde, elle se trouve dans les fondements du modèle institutionnel néolibéral dépassé. Face à cela, et à toute solution autoritaire, nous proposons la convocation immédiate d'élections générales et l'organisation d'un référendum pour convoquer une Assemblée Constituante. »
Cette déclaration illustre bien la différence, en Amérique latine comme ailleurs, entre la gauche, même quand elle prend des mesures intéressantes (en Bolivie, notamment) et les organisations révolutionnaires. Il n’y a rien à attendre de Lula, pas grand-chose de Maduro, qui opère, lui aussi un virage à droite, en écartant le Parti Communiste Vénézuélien, et manifestement, à l’usage, ni de Castillo.

Pour le Parti Révolutionnaire COMMUNISTES, il n’y a rien à attendre des pseudo-marxistes ou des marxistes repentis, des dirigeants de gauche qui mettent de l’eau dans leur vin. Les revendications des travailleurs du Pérou sont justes, tant les économiques (augmentation des salaires, réforme agraire), que les politiques (qu’ils s’en aillent tous et élections générales, assemblée constituante). Nous soutenons ces luttes et ces revendications, nous appelons la « présidente » à cesser la répression. Vive la lutte des travailleurs du Pérou !

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