N° 825 13/06/2023 Manœuvre Air defender 23 de l'OTAN. Sénégal : révolte populaire ou épisode du conflit inter-impérialiste ?
Manœuvre Air defender 23 de l'OTAN
L'exercice Air Defender 23, coordonné par l'Allemagne, se déroulera sur une dizaine de jours à partir du lundi 12 mai et réunira des aéronefs militaires de 25 pays. Depuis le début de la guerre impérialiste en Ukraine, en février 2022, les alliés de l'OTAN ont multiplié en Europe les exercices d’entraînement sur terre, en mer ou dans les airs. Il en est ainsi de l'exercice Saber Guardian que le général roumain Constantin Nicolaescu, qui coordonne l’exercice décrit ainsi : " Depuis un mois, nous sommes sur le terrain pour préparer cet assaut au-delà du Danube, avec l’objectif de défaire l’ennemi ", " Nous ne nommons pas [cet objectif], précise le lieutenant-colonel français Mathieu, à la tête des 350 soldats français engagés dans l’exercice. Mais cela pourrait bien être l’armée russe."
Saber Guardian, qui réunit, sous commandement américain, plus de 10.000 soldats sur plusieurs sites en Roumanie, succède à d’autres, comme Orion, Spring Storm, Baltic Operations, Joint Warrior …Ces nombreux exercices s’appuient notamment sur les bataillons – un millier de militaires – installés dans les huit pays du flanc oriental de l’Alliance. Quatre de ces exercices avaient eu lieu dès 2014 dans les États baltes et la Pologne, et quatre autres, en Slovaquie, Hongrie, Roumanie et Bulgarie, ont été mis sur pied quelques semaines après le début de la guerre en Ukraine.
Ces troupes doivent être soit positionnées dans ces pays, soit y être projetées en quelques heures. En mai, les Américains ont envoyé 3.000 personnes en Pologne en soixante-douze heures, tandis que les Allemands se préparent à le faire courant juin en Lituanie. Lors du sommet de l’Alliance, prévu à Vilnius les 11 et 12 juillet, où un premier bilan de ce nouveau dispositif de défense et de dissuasion devrait être tiré.
Selon l'ambassadrice des États-Unis en Allemagne, Amy Gutmann L'exercice serait de nature purement défensive mais aura aussi pour but d'envoyer un message, notamment à la Russie : "Je serais très surprise qu'un dirigeant mondial ne prenne pas note de ce que cela montre en termes d'esprit de cette alliance, ce que signifie la force de cette alliance, et cela inclut Vladimir Poutine".
Mieux, le général Ingo Gerhartz, chef de l'armée de l'air allemande affirme que cet exercice ne vise précisément "personne". Quant au général Michael Loh, directeur de la Garde nationale aérienne américaine : "Cet exercice vise à compléter la présence permanente des États-Unis en Europe et à fournir une formation à une plus grande échelle que ce qui est habituellement accompli sur le continent".
Comment croire ces déclarations défensives quand on connaît le rôle que les États-Unis, leurs alliés et l'OTAN ont joué et jouent dans tous les conflits depuis la fin de la deuxième guerre mondiale et dans la toute dernière période en Irak, en Yougoslavie, en Libye...comment croire à ces professions de foi défensives quand depuis la fin de l'URSS et la dissolution du pacte de Varsovie qui la liait aux démocraties populaires en Europe, les États-Unis et l'OTAN n'ont eu de cesse d’élargir leur champ d'activité jusqu'aux frontières de la Fédération de Russie en reniant leurs engagements pris au moment de la chute du mur de Berlin! En réalité ces manœuvres sont un pas en avant vers l'intensification de la guerre au sein du système impérialisme pour la conquête des richesses naturelles, le contrôle des voies de communication et celui de la force de travail, elles sont un avertissement aux peuples qui entendraient se révolter pour abattre le capitalisme et construire une société qui en serait débarrassée. La lutte pour la paix, pour que cesse les conflits armés en cours, ne peux pas passer par l'escalade guerrière que trace les gouvernements capitalistes, dont celui de la France, qui accroissent leurs budgets militaires au détriment des besoins des travailleurs, elle passe par la lutte des classes résolue pour en finir avec le système prédateur par essence qu'est le capitalisme et par la dissolution des alliances militaires, dont l'OTAN, fidèles chiens de garde de l'exploitation de l'homme par l'homme.
Sénégal : révolte populaire ou épisode du conflit inter-impérialiste ?
Le procès Sonko et ses conséquences
Jeudi 1er juin, est tombé le verdict du procès d’Ousmane Sonko, principal leader de l’opposition politique au président sénégalais, Macky Sall. Accusé par Adji Sarr, une ancienne employée d’un salon de massage, de viols répétés entre décembre 2020 et février 2021, le dirigeant du PASTEF (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) a été acquitté de ce chef d’accusation, ainsi que de celui de menaces de mort, mais condamné à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse » (la plaignante avait 21 ans au moment des faits), une peine qui suffit à le rendre inéligible pour la présidentielle de février 2024. L’abandon par les magistrats de l’accusation de viol est d’autant plus étrange que la propriétaire du salon de massage a été condamnée à deux ans de prison ferme pour « incitation à la débauche » et devra payer solidairement avec Ousmane Sonko 20 millions de francs CFA (quelque 30.000 euros) de dommages et intérêts à Adji Sarr.
Si la victime est effondrée et pense que son violeur a gagné, ce n’a pas du tout été l’avis des partisans politiques d’Ousmane Sonko.
Dès la condamnation connue, des violences ont éclaté dans plusieurs villes du pays. Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre la police anti-émeutes et des partisans de l’opposant, selon le ministre de l’Intérieur.
Ce sont notamment des jeunes qui ont manifesté, de Dakar, à partir de l’université, qui a depuis été fermé par les autorités, mais aussi de Ziguinchor, capitale de la Casamance, dont Sonko est maire et d’autres grandes villes : Kaolack et Saint-Louis, notamment.
Cette révolte d’une partie de la population s’explique notamment par la situation économique et sociale du pays.
La misère frappant le monde du travail s’amplifie au Sénégal. La faim s’installe dans les familles des classes laborieuses. Les travailleurs subissent des agressions aggravées de la part des patrons locaux, des multinationales et de l’État. Les licenciements, les salaires impayés, les indemnisations judiciaires non exécutées, les pensions non versées, les fermetures d’entreprises, les emplois précaires, les coûts exorbitants de la scolarité, de la santé sont le lot quotidien des familles des classes laborieuses pendant que les scandales de détournements des deniers publics en milliards de francs CFA se succèdent en toute impunité.
Enfin, dans un pays essentiellement agricole, qui vit depuis des siècles sous un régime de collectivisation des terres, les actes de démantèlement de ce régime se multiplient et provoquent aussi la colère des masses paysannes. Partout les héritiers du droit coutumier : paysans, pêcheurs, éleveurs du monde rural et ouvriers, saisonniers sont spoliés par la privatisation de la terre au profit des multinationales ou de la bourgeoisie agrarienne.
Pour essayer d’analyser ce qui se passe au Sénégal depuis le début du mois, nous allons d’abord essayer de donner quelques caractéristiques économiques de ce pays.
La Terre
Au Sénégal, la terre appartient principalement à l’État, cet ensemble s’appelle le "domaine national".
C’est la loi du 17 Juin 1964 relative au domaine national qui l’a réalisé. Dans l'exposé des motifs, de cette loi il est dit : « l'État, héritier légitime, des anciens pouvoirs coutumiers, devient l'unique « Maître de la terre qui est purgée de tous les droits et érigée en domaine national ». Les articles 2 et 3 de la loi confirment en stipulant respectivement que : - « l'État détient des terres du domaine national en vue d'assurer leur utilisation et leur mise en valeur rationnelle, conformément aux programmes d'aménagement » - « les terres du domaine national ne peuvent être immatriculées qu'au nom de l’État ». Dans la pratique du régime hyper présidentiel que vit le Sénégal, l'État et le Chef de l'État sont confondus et malgré la politique de décentralisation qui en est à son troisième acte, le pouvoir central, le Président de la République, ne veut céder aucune de ses prérogatives en matière de gestion foncière aux collectivités décentralisées.
Par ailleurs, la possession par l’État de l’ensemble des terres est désormais un mythe. En pratique les gouvernants successifs (socialistes, puis libéraux) ont privatisé la terre au détriment de l'État (propriétaire) et des paysans (usagers).
Depuis les années 80, la Banque mondiale et le FMI, n'ont raté aucun programme de coopération avec le Sénégal, sans poser la nécessité d’une réforme, pour institutionnaliser la privatisation des terres du « Domaine National », contre laquelle une vive résistance s'est organisée dans le monde rural. Au total, sous les régimes des "Socialistes" Senghor et Diouf, du premier président "Libéral", Wade et du second, Sall, 20% des terres arables ont été accaparées, dont 5% chez les premiers, 12% chez le second, et 3% chez le troisième ! C'est donc dire que de 1960 à nos jours, il y a une continuité évidente dans le processus d'accaparement-privatisation des terres arables du pays principalement par les firmes capitalistes agro-alimentaires et subsidiairement par des féodaux agrariens.
La perspective d’un nouveau plan d’aide du FMI et les demandes pressantes de certains États impérialistes et récemment, pour la première fois, de l’Union Européenne pour « l’ouverture au marché » des terres du Sénégal provoquent beaucoup d’inquiétudes et les luttes paysannes ont repris de plus belle.
Un pays sous le joug du néocolonialisme
Comme beaucoup de dirigeants africains, les gouvernants successifs du Sénégal ont mené une politique économique et notamment industrielle néocoloniale, au service des monopoles capitalistes, spécialement français, pour ce qui est du Sénégal. Cette continuité des politiques économiques néocoloniales a pour origine : l'intégration du pays, plus généralement l'Afrique comme périphérie pourvoyeuse de matière première à la division internationale du travail de l'ère du capitalisme impérialiste. Le libre-échange poussé à son paroxysme est la politique économique la plus avantageuse pour assurer la mainmise des firmes multinationales sur les sources de matières premières en les privatisant à son profit.
L'exportation des capitaux dans les pays dominés, qui est une des particularités fondamentales du stade impérialiste, a pour fonction essentielle d'assurer le profit maximum « parce qu'en raison du moindre développement, le taux de profit y est d'une façon générale plus élevé » (K.Marx, Le Capital). Le néocolonialisme est l'expression de la volonté des puissances coloniales de maintenir leur joug unilatéral sur les ex-colonies, mais il favorise objectivement la concurrence des autres puissances rivales. Monopole et concurrence se superposent et s'opposent ainsi sous le capitalisme impérialiste.
Pour duper les peuples victimes du néocolonialisme, les puissances impérialistes ont forgé un arsenal idéologique tendant à faire croire que "leur coopération" est une "aide indispensable au développement". Le message est le suivant : "Vous ne savez rien faire par vous-mêmes, aussi sommes-nous chez vous, après vous avoir donné l'indépendance, pour vous aider à vous développer".
Ce logiciel mis en place à travers les "accords de coopération" est complété par le besoin de tout faire pour empêcher la réussite des expériences d'indépendance nationale. D'où par exemple le blocus de la Guinée du NON par l'encerclement avec la complicité néocoloniale du Sénégal et de la Côte d'Ivoire, le sabotage monétaire par la fabrication massive de faux billets de francs guinéens et l'agression militaire de la Guinée en 1970.
Mais une fois les prix des matières premières contrôlés et rognés à la baisse, l'impérialisme a lancé les pays africains dans le cycle infernal de la dette et du paiement des intérêts de celle-ci. L'endettement est devenu un tentacule de la pieuvre impérialiste pour les mettre sous perfusion jusqu'à la dévaluation du franc colonial CFA. La période des années 70 et 80 fut marquée, dans les pays dominés par les puissances impérialistes dont le Sénégal, par la crise de surproduction avec une production de marchandises sans acheteurs et de suraccumulation avec toujours plus de capital-argent sans secteurs et lieux d'investissements en raison du rétrécissement de la sphère d'influence néocoloniale. Pour résoudre cette contradiction, il fallait s'attaquer en les privatisant aux secteurs publics et parapublics des pays de la périphérie du système impérialiste. La dévaluation du franc colonial CFA a été la réponse à cette exigence de privatisation pour faire circuler le capital-argent accumulé en rachetant à des coûts divisés par deux les entreprises publiques et parapubliques des pays africains.
De même, une fois obtenue la restauration du capitalisme dans l'ex-camp socialiste d'Europe, on a assisté à une ruée des monopoles capitalistes qui se sont taillés, dans un premier temps, la part du lion des économies socialistes privatisées au détriment des nouveaux capitalistes. Cette ruée s’est poursuivie en Afrique, dans les pays qui avaient jusque-là tenté une politique différente, appuyée sur l’URSS, parfois d’obédience socialiste.
C’est donc la première chose à retenir : le Sénégal est un pays sous domination des puissances impérialistes.
Un néocolonialisme bien plus diversifié qu’il n’y paraît
Pour autant, la situation est plus complexe. Depuis que Macky Sall est au pouvoir, le recours à "l’aide" des puissances impérialistes s’est diversifié et encore plus depuis la guerre en Ukraine.
Si on remonte à 3 ans, il y avait beaucoup de bruit autour du pétrole. Total avait fait de la recherche pétrolière au Sénégal des années 50 à 1976. N'étant probablement pas convaincu par les perspectives de rentabilité, Total a vendu sa licence aux Américains et aux Britanniques. Ceux-là même qui ont découvert du pétrole et du gaz en 2014. Au moment de quitter ses fonctions, l'ancien ambassadeur français au Sénégal, M. Bigot avait clairement reconnu : nous ne reprochons pas au Sénégal la diversification de son économie, nous pensons cependant que le Sénégal aurait dû associer davantage la France dans le dossier des hydrocarbures. Pour calmer l'énorme et permanente tension artificiellement créée à l'époque, le gouvernement sénégalais avait octroyé une licence à Total et acheté le TER d’Alstom.
Mais après le discours de Bigot, les plus curieux sont allés fouiller dans les dossiers économiques régulièrement publiés par l'ANSD (équivalent de l’INSEE au Sénégal). Et là, on se rend compte qu'en 10 ans, la contribution des entreprises françaises à la formation du PIB sénégalais est passé de 25 % à 15 %. Ceci, grâce à une diversification faite en douceur par le gouvernement. C'est la guerre en Ukraine qui a fait aussi découvrir que les importations de blé et de ses dérivés (2eme poste des achats à l'étranger du Sénégal, après le riz) qui se faisaient exclusivement avec la France, ont été aussi touchées par la diversification. Le Sénégal achète 52 % du blé et dérivés à la Russie, 6 % à l'Ukraine et 32 % seulement à la France.
Les intérêts français ont sérieusement été touchés par la politique de Macky Sall depuis 2012.
Sans faire de bruit comme le faisait Wade, le libéral Macky Sall, non moins ancien maoïste, a discrètement mené une politique étrangère indépendante. Les relations avec la Chine sont très solides en ce moment. Le Sénégal a adhéré à l'OPEP du gaz, aux côtés de l'Iran, le Venezuela, etc., dont le principal objectif est de disputer le monopole du gaz aux États-Unis. Les autorités étasuniennes ont fait de Dakar une destination privilégiée, multipliant les "dons" et les "aides" pour éviter que la coopération avec la Chine et la Russie ne connaisse d'autre développement.
Depuis 1960, les pays africains sous domination française, britannique ou étatsunienne ont été un électorat automatique de l'Occident dans les organismes internationaux. Depuis son arrivée au pouvoir, Macky Sall n'a cessé de réclamer une place pour l'Afrique au conseil de sécurité de l'ONU. En prenant une position nette de neutralité dans la guerre d'Ukraine, il a décomplexé la moitié des pays de l'Union africaine qu'il dirigeait au moment de l’invasion russe.
Macky Sall fait partie de ces dirigeants africains qui s’intéressent aux BRICS. Le groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) a le projet de créer une monnaie destinée à concurrencer puis à remplacer le dollar comme monnaie de réserve et surtout comme unité de compte (monnaie dans laquelle sont libellés les biens et services du commerce international). Ce projet prend corps depuis les sanctions antirusses. L’espoir des dirigeants des BRICS et de ceux qui, en Afrique ou ailleurs, les supportent franchement, est de voir tous les pays en développement abandonner le dollar pour adopter leur future monnaie dans les échanges internationaux.
En termes de population, le BRICS représente déjà plus de la moitié de l'humanité et depuis l'éclatement de la guerre d'Ukraine, 19 pays ont déposé leur demande d'adhésion. Les BRICS envisagent déjà, et ce sera confirmé par leurs prochaines réunions, des alternatives à la banque mondiale et au FMI. Bien que le Sénégal n'ait pas encore demandé à adhérer aux BRICS, Macky Sall a flairé cette évolution et passe pour un représentant tout désigné de l'Afrique aux yeux de la Chine, de la Russie, de l'Inde, de la Turquie. Toutes choses qui inquiètent l'Occident. Il y a six mois, un ministre allemand disait qu'il faut obliger le Sénégal à clarifier sa position.
Quelle analyse ?
Les manifestations se sont raréfiées la semaine dernière, on constate une sorte de retour au calme. Les partisans du pouvoir et de l’opposition se renvoient la balle. Le parti de Sonko, le Pastef accuse le gouvernement d'utiliser « des milices privées » pour « mater » les populations civiles et il continue surtout d'exhorter les Sénégalais « à se défendre par tous les moyens et à riposter ».
De son côté, le gouvernement continue lui aussi d'avancer et d'accuser. Il dénonce pour sa part les « actes de vandalisme et de banditisme » dont il rend responsable les partisans de Sonko. Il s'interroge sur les « forces occultes » soutenues par l'étranger qui viennent déstabiliser le pays et le « plonger dans le chaos ». Il affirme que certains manifestants sont armés.
Les organisations qui soutiennent plus ou moins le gouvernement indiquent également qu’ont manifesté des agresseurs de métier, des enfants. Les partisans du gouvernement annoncent qu'il y a beaucoup de manifestants étrangers qui avaient des armes de guerre dont même l'armée sénégalaise n'est pas dotée. Les autopsies pourraient montrer que beaucoup des 16 victimes survenues à la suite des manifestations ont été tuées par ces armes-là.
Difficile d’y voir complètement clair. Le régime de Macky Sall n’a rien de sympathique, mais le problème est que son opposant principal ne l’est pas vraiment non plus.
Ousmane Sonko est un islamiste, proche des groupes islamistes armés de l'Afrique de l'Ouest, il était membre de leurs associations d'étudiants quand il était à l'université. Il est toujours en relation avec eux par le biais d'un de leurs représentants au Sénégal, qui pourrait être le gros financier du parti de Sonko. C'est la première fois qu'on voit au Sénégal, un parti qui collecte des centaines de millions en 48 heures, à la suite d'un appel à une levée de fond. Les fascistes islamistes ont toujours privilégié les zones pétrolifères, qui plus est, quand celles-ci ont une ouverture sur la mer.
Le discours de Sonko est un mélange d’anticolonialisme affiché ; « France, dégage » ; ce qui ne l'empêche pas de lécher les bottes des directeurs de RFI et France 24, d'islamisme radical, d'ethnicisme (il est aussi très lié à l'une des branches du mouvement séparatiste de la Casamance, le MFDC). Les moyens financiers lui viennent essentiellement des islamistes, mais il passe aussi le plus clair de son temps à racketter les petites entreprises et les gros commerces installés au Sénégal. Enfin, il vaut s’attaquer à un pilier de la société sénégalaise : les confréries religieuses, pacifistes, loyalistes, et implantées partout dans le pays depuis des siècles, qui pratique un islam « à la sauce sénégalaise », très tolérant et peu goûté des fondamentalistes. Pour installer un "autre islam" dans le pays, il lui faut réussir à les anéantir.
La présence, derrière Sonko, des groupes islamistes armés d’Afrique de l’Ouest, donne à penser que peut-être, il y a une tentative de déstabilisation du pays. Mais ces groupes ne sont pas des mouvements spontanés, ils sont soutenus par certaines puissances impérialistes, au premier chef les USA, mais aussi la France.
Qu’il y ait une révolte populaire contre un régime néocolonialiste et corrompu est une évidence. Mais cette révolte ne peut pas cacher que les puissances impérialistes du passé de l’Afrique aimeraient bien reprendre la main, face à un pouvoir un peu trop proche des Chinois et des Russes, ce ne serait pas la première fois que les impérialistes français et/ou états-uniens utiliseraient des fascistes islamistes pour cela.
Enfin, un élément frappant est la présence, dans les deux camps de militants plus ou moins proches du mouvement communiste, qui pensent que la Chine et la Russie ne sont pas des puissances impérialistes, ou, tout du moins, qu’il faut être dans leur camp contre les USA et les pays impérialistes de l’UE. Les uns mettent en avant les positions de Macky Sall se démarquant des impérialismes tutélaires, pour se rapprocher de la Chine et de la Russie, les autres l’accusent d’être un valet de la « Françafrique ».
Dans les deux cas, il y a une illusion : il existerait un camp néocolonial et un camp patriotique avec la Bourgeoisie compradore dans l’un et la Bourgeoisie nationale patriotique dans l’autre. Dans toute l’histoire de la décolonisation, on a vu ce qu’ont donné les alliances entre les classes laborieuses (ouvriers et paysans) et la Bourgeoisie nationale patriotique, qu’on a laissée diriger la lutte pour l’indépendance : rien de bon de Sadate à Compaoré en passant par Saddam, Chadli et Sukarno. Le prolétariat ne peut déléguer à aucune autre classe ou frange de classe la direction de la lutte pour abattre le capitalisme. Et ce qui se passe au Sénégal ressemble beaucoup à une lutte entre deux franges de la Bourgeoisie sur fond de conflit inter-impérialiste.
Au Sénégal comme ailleurs sur le continent africain, les affrontements au sein de l'impérialisme sont particulièrement violents. Ce continent, jeune, riche de ressources naturelles et humaines est l'objet d'intenses convoitises de la part des puissances impérialistes. Notre solidarité va aux luttes des peuples, de leurs ouvriers, paysans et intellectuels et des forces politiques qui entendent mener des politiques d'indépendance économiques, politiques, sociales et de paix au bénéfice des populations.