Gantry 5

 

N° 884 31/07/2024  Les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales du groupe du G20 se sont réunis au Brésil dans le cadre de la préparation du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement prévu en novembre. A cette occasion, outre le constat, par la Présidence brésilienne, des divergences de vues des membres du groupe au sujet des conflits en cours (Ukraine, Palestine) et de la volonté des uns contre celles des autres de traiter ces sujets dans le cadre du G20, la réunion s’est conclue par une déclaration pour une coopération fiscale internationale.
Le Brésil, dirigé par les équipes du Président Lula, tenait à faire avancer le dossier de la taxation des super-riches. Il avançait l’idée d’un impôt minimum sur les plus grandes fortunes mondiales. L’objectif brésilien est assez prosaïque : de fait, il s’agit de lutter contre la « concurrence » fiscale des pays très accueillants (et peu regardant aussi) envers les fortunes délocalisées dans leurs établissements financiers. Des années de déréglementations financières – avec à la clé une totale liberté de circulations des capitaux et donc des fortunes – ont privé de recettes fiscales nombre pays de tout niveau de développement économique.
Une telle situation contribue aux inégalités de richesse et de revenu qui « compromettent la croissance économique et la cohésion sociale, et aggravent les vulnérabilités sociales » selon le communiqué final de la réunion. Nous peinons à croire que « l’évasion fiscale » soit vraiment le nœud des problèmes socio-économiques du monde contemporain dans la mesure où les gardiens (notamment quelques-uns présents à cette réunion de grands argentiers nationaux et autre ministres des finances) ont précisément confié les clefs aux ultra riches, ainsi en capacité de faire « prendre la poudre d’escampette » à leurs fortunes, placées dans des contrées plus accueillantes. A un tel niveau d’obligeance, s’agit-il vraiment encore d’évasion ?
Le ministre brésilien des finances M. Haddad, considère que la déclaration du G20 est un premier pas et même une « conquête de nature morale ». Et sans doute que les grandes fortunes de ce monde en tomberont d’accord, si préoccupées des questions morales.
Alors, bien sûr, les Etats-Unis, hostiles à la proposition initiale brésilienne, ont accepté de souscrire à l’idée qu’il fallait faire quelque chose, tout comme les autorités allemandes, mais dans le respect des souverainetés fiscales. Il est vrai que les Etats-Unis sont un modèle de respect de souveraineté des nations et que l’Allemagne l’a aussi démontré, particulièrement aux Grecs dans la panade alors que les plus riches d’entre eux plaçaient leurs fortunes… notamment en Allemagne.
Singulièrement, la France a soutenu la proposition initiale brésilienne, en ligne avec l’Espagne, l’Afrique du Sud et de l’Union africaine. La France, gouvernée par Macron, dont une des premières mesures fut de supprimer l’impôt sur la fortune sans prendre la peine ne serait-ce de la recalibrer pour obtenir une plus grande contribution des super-riches aux recettes fiscales.  La France, aussi, puisque c’est l’actualité, qui a permis à un super riche, ami certifié du Président, de se mettre en vedette dans le cadre des jeux olympiques. Encore une illustration du « en même temps ».
En fait, s’agit-il pour les peuples souverains, d’essayer de prendre l’argent où il se trouve ou de prendre possessions pleines et entières des facteurs qui créent cet argent, en dernière analyse, leur travail ? Tenter de « moraliser » le capitalisme ou rendre aux travailleurs l’entièreté de leur travail ?
Poser ainsi l’enjeu ne laisse aucune place à l’ambigüité dans le débat. Une rupture avec le capitaliste est la seule voie possible pour que cesse l’accroissement de la misère concomitant à celui d’une indécente richesse. Le vrai combat est précisément d’organiser les luttes des travailleurs pour préparer cette rupture, qui ne se décrétera pas dans une réunion des puissances mondiales toutes acquises au capitalisme.