Gantry 5

 

720-09/06/2021 Le 2 juin des agriculteurs bio venus manifester à Paris se sont dévêtus aux Invalides pour illustrer comment les dernières dispositions du PSN (Plan Stratégique National) les met « à poils ».

La nouvelle politique agricole commune de l’Union européenne (PAC) sera mise en œuvre au 1er janvier 2023 pour 5 ans. En octobre 2020, le parlement européen a voté les bases de cette politique.
Dans notre article « Juste et verte, la future PAC ? Hebdo n° 690) nous émettions des doutes quant à la réalité du verdissement annoncé de la PAC. Ensuite, s’est déroulé le trilogue, la discussion entre Parlement, Commission et le Conseil des ministres. Puis après l’arbitrage rendu par le gouvernement français, le 21 mai dernier, sa déclinaison nationale, le PSN a été présenté aux organisations syndicales agricoles avec la répartition des 9,5 milliards d’euros affectés à l’agriculture française.
Sans surprise, la FNSEA, Fédération Nationale des Exploitants Agricole, largement majoritaire, est globalement satisfaite : l’agriculture intensive traditionnelle. Pour elle, c’est « virage environnemental fort (…) avec des "des orientations pertinentes" et des "avancées". Ouf ! on ne touche pas à l’agriculture industrielle dans laquelle ont investi banques et autres fonds de pension français ou étrangers. La financiarisation de l’agriculture va prospérer sans limite. Les exploitants modestes viscéralement attachés à leur syndicat envers et contre leurs intérêts vont finir de mourir sans bruit.
La Coordination rurale, marquée à l’extrême-droite, cultive le rêve nostalgique d’une agriculture, « indépendante, apolitique et responsable », mue par le « bon sens » n’attend rien de cette nouvelle PAC et négociera tout ce qui peut l’être.
La Confédération Paysanne, la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique et diverses ONG et associations écologistes se disent très déçus par le volet du soutien au biologique. Les aides directes à la conversion au bio sont augmentées mais les aides au maintien de cette agriculture sont entièrement supprimées. Cependant les régions peuvent maintenir cette aide qui ainsi, peut varier de 160 à 600 euros à l’hectare.
L’objectif annoncé à grand bruit par Macron d’un grand pas vers le bio, les circuits courts, l’alimentation saine, la qualité environnementale, la lutte pour la santé des consommateurs et des travailleurs de la terre se révèle pour ce qu’il est : encore un enfumage ! Le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie a dû reconnaître que les 15 % de surfaces agricoles consacrées au bio claironnés par Macron se réduisent en fait à 10 % mais l’objectif a été relevé à 18 % ...
Le « verdissement » c’est aussi les « écorégimes », des aides liées à la « HQE », Haute Qualité Environnementale. Les bonnes pratiques agricoles devront couvrir les activités liées au climat, à l'environnement, au bien-être des animaux et à la résistance aux antimicrobiens. Les contraintes de base sont si faibles que toutes les exploitations peuvent y prétendre. Les pesticides et engrais de synthèse sont évalués autrement, la somme qui leur est consacrée ne doit pas dépasser 30 % du chiffre d’affaires. Ce n’est pas rien !
Beaucoup de bruit pour rien. Ni les agriculteurs en conventionnel ni ceux en bio n’y trouvent leur compte, seule la pratique diffère mais les exploitations en bio sont contraintes de s’agrandir d’année en année, de s’endetter pour tenter de maintenir un revenu vital. La main d’œuvre des champs a changé, la famille du petit paysan a laissé place à des dizaines milliers de travailleurs immigrés qu’on déplace en camion selon les saisons et les travaux.
Ce qui a pu sembler un modèle vertueux porteur d’avenir et qu’on nous a largement vendu ressemble de plus en plus au modèle largement rejeté de firmes industrielles aux mains du capital. Que les profits soient tirés du bio ou du traditionnel, qu’importe ! la terre doit rendre le maximum pour qu’après avoir financé les requins de la distribution, ses fruits puissent nourrir à moindre frais les autres travailleurs aux salaires honteusement bas.
La terre, comme tout moyen de production de richesses, doit revenir aux travailleurs. Là seulement, elle nourrira l’humanité dans des conditions de préservation de l'outil de travail pour aujourd'hui et les générations futures. Pour cela, il faut rassembler dans la lutte politique pour une agriculture moderne s'appuyant sur la recherche agronomique et capable de rémunérer ceux qui y travaillent. Cette alliance pour une telle agriculture doit rassembler les travailleurs ruraux et leurs familles, les ouvriers agricoles immigrés ou non, les salariés eux-mêmes consommateurs et qui exigent des produits de qualité. Cela nécessite, par la lutte, d'arracher des mains des grandes firmes privées la propriété des terres, le monopole, du matériel agricole, des intrants et des semences ainsi que celui du grand commerce agro-alimentaire.

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