N° 846 08/11/2023 Le Conseil d’État main dans la main avec Darmanin
Après une semaine d’attente, le Conseil d’Etat a tranché en faveur du ministère de l’intérieur. Dans son ordonnance rendue ce mercredi, l’institution a confirmé l’arrêté d’expulsion visant Mariam Abu Daqqa, militante du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) venue en France pour une série de conférences.
Le Tribunal Administratif avait suspendu l’arrêté d’expulsion et le ministère a fait appel. Le Conseil d’État, instance dont la proximité politique avec le pouvoir n’est plus à démontrer jugeait donc en appel. Contrairement au Tribunal Administratif, il estime que l’expulsion de la militante « ne peut être considérée comme portant une atteinte gravement illégale à sa liberté d’aller et venir, ni, en tout état de cause, à sa liberté d’expression ». On aimerait bien savoir pourquoi.
L’argumentation de la représentante du ministère de l’intérieur est inacceptable ; pour elle, les conférences de Mariam Abu Daqqa, qui évoquent la colonisation et l’apartheid en Israël, si elles relevaient d’un débat « admissible » jusqu’au 7 octobre et l’attaque du Hamas, étaient désormais de nature à mettre « de l’huile sur le feu » après cette date.
Cela signifie que dire désormais la réalité, à savoir qu’Israël est un État colonialiste qui pratique l’apartheid et essaie de se débarrasser des Palestiniens serait interdit, sous peine de mettre de l’huile sur le feu. Que dire de l’expression « Israël a le droit de se défendre », leitmotiv de nos media ? Ne met-elle pas, non de l’huile, mais de l’alcool à brûler sur le feu ?
Mariam Abu Daqqa paie surtout le fait d’être une militante du FPLP, une organisation que l’UE a rangé dans sa liste des « terroristes », ce qui conforte notre position consistant à récuser ce qualificatif de l’idéologie dominante. Pour nous, le FPLP est une organisation de la résistance palestinienne, y compris armée. Le Conseil d’État nous l’explique on ne peut plus clairement : « l’instruction a démontré qu’aucun trouble matériel à l’ordre public n’a été constaté à l’occasion de ses interventions publiques sur le sol français, mais Mariam Abu Daqqa est non seulement demeurée membre du Front populaire de libération de la Palestine, mais qu’elle est une dirigeante du mouvement. ».
Faire taire une voix dissidente, surtout si elle est palestinienne
Il ne s’agit plus de censure mais carrément de faire taire toute opinion dissidente, c’est bien la fonction de l’utilisation du vocable « terroriste » ; le Conseil d’État en use comme nos media. Nous partageons l’avis de l’avocate de Mariam Abu Daqqa pour qui cette décision est extrêmement grave : « C’est extrêmement préoccupant sur l’état de nos libertés publiques car cela vient consacrer un ministre de l’intérieur tout puissant à décider de la validité d’un débat critique. ».
Mardi 7 novembre, lors d’une conférence de presse au Centre international de culture populaire à Paris, Mariam Abu Daqqa s’était exprimé à propos de cet épisode juridique. « Dans ces circonstances, on veut me faire taire. On veut nous interdire de nous exprimer face à cette horreur. Et c’est ça qu’on appelle aujourd’hui la démocratie et les droits de l’Homme ? », dénonçait-elle. Nous avons pris cet appel comme une condamnation par le gouvernement de la lutte de notre peuple dans son ensemble. On a le sentiment qu’il faut qu’on meure sans rien dire. »
Nous ne nous tairons pas !
Si cet épisode nous confirme la totale proximité politique du Conseil d’État avec le pouvoir actuel et les grands capitalistes, il est aussi le signe que la seule venue, pour participer à des débats, de cette militante de 72 ans, qui a perdu une trentaine de membres de sa famille, ainsi que sa maison dans le génocide en cours, fait peur à l’État français et à son complice sioniste.
Ils ne la feront pas taire, ils ne feront pas taire les militantes et les militants solidaires de la cause palestinienne, notamment celles et ceux du Parti Révolutionnaire Communistes. Notre parti condamne fermement cette décision. Nous continuerons à soutenir la cause palestinienne, à dénoncer et à condamner l’apartheid, la colonisation, le génocide. Et nous apportons toute notre solidarité à Mariam Abu Daqqa, ainsi qu’au FPLP et à ses dirigeants prisonniers des geôles sionistes, en particulier son secrétaire-Général, Ahmed Saadat.