N° 891 18/09/2024 Ce qui est à l'ordre du jour pour les capitalistes, c'est l'accélération et l'approfondissement de la politique visant à liquider toutes les conquêtes sociales des travailleurs. Ce besoin, impératif pour rétablir les taux de profits, résultats de l'exploitation du travail salarié, doit trouver sa traduction et sa mise en œuvre dans les politiques de l'État. C'est ce à quoi s'emploient tous les gouvernements depuis des décennies. C'est ce qui provoque la colère sociale. Des gilets jaunes à la lutte contre la réforme des retraites, aux luttes multiples pour les salaires et l'emploi, c'est cette montée de la lutte de classe, le désaveu des forces politiques de droite et de gauche qui en alternance ont mis en œuvre ces politiques qui ont conduit la classe capitaliste à mettre en selle le Rassemblement National comme réceptacle du mécontentement et assurance qu'il ne mettrait pas en cause les intérêts capitalistes ; bien au contraire. Aujourd'hui usé, le pouvoir incarné par le ni gauche, ni droite macronien tente de réorganiser la vie politique en mettant en selle tout ce que notre pays compte de forces politiques acquises ouvertement aux exigences patronales. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour comprendre tout le sens de la séquence politique que nous venons de vivre depuis les élections européennes, puis les législatives anticipées qui ont mis en lumière le désaveu profond de la politique du pouvoir et la suite avec la nomination d'un premier ministre commençant à mettre en selle le rassemblement National pour la mise en œuvre d'une politique brutale d'austérité pour les travailleurs, tandis que la reconstitution d'une social-démocratie purifiée de ses pêchés de gestionnaire loyal des intérêts du capital est en voie de reconstruction.
Face à cette situation, compter sur des avancées possibles par la voie des institutions en alignant le calendrier syndical sur celui du tempo parlementaire et en apportant un soutien à la coalition électorale d'un Nouveau Front Populaire non seulement minoritaire, mais aussi hétéroclite et refusant de se donner les moyens de s'attaquer réellement à la politique du capital, c'est d'emblée se mettre en position défensive et créer des illusions conduisant rapidement au découragement. C'est ainsi que le front républicain que l'on nous vend à chaque élection et qui se veut ignorant de la réalité des affrontements de classe, s'est aujourd'hui refermé comme un piège ; celui de la mise en œuvre d'une politique de super-austérité pour les travailleurs. Cette stratégie a pourtant marqué les prises de positions de la CGT dans la dernière période.
La direction confédérale de la CGT a fait depuis longtemps le choix du « dialogue social », c’est-à-dire de la négociation sans rapport de force, autant dire une alternative entre collaboration de classe et échec patenté. Nous l’avons plusieurs fois écrit, elle a remplacé en 1995 l’abolition du capitalisme par le syndicalisme rassemblé, l’adhésion aux valeurs de l’Union européenne et l’illusoire partage des richesses qui interdit de poser la question centrale : « Qui possède les moyens de production et d’échange ? ». Et peu à peu, elle s’est calée sur le calendrier institutionnel dans les ripostes organisées, l’exemple le plus flagrant étant la bataille contre la réforme des retraites et elle remet ça avec le 1er octobre, premier jour de l’examen du budget. Mais l’épisode de juillet est un pas de plus franchi dans l’abandon de la lutte des classes. En soutenant le programme le moins hardi qu’ait jamais défendu la gauche unie depuis 1958, sans aucune nationalisation, belliciste et prosioniste et en faisant campagne active, les cadres de la CGT ont stigmatisé la majorité de la classe ouvrière qui ne croit pas aux illusions électorales et s’abstient, ou, écœurée par les prestations de la gauche qui a produit Macron, s’égare dans le vote RN. Bien que n’étant pas un mouvement politique qui se présente aux élections, la direction confédérale de la CGT semble avoir suivi le conseil de Terra Nova, oublier la classe ouvrière pour défendre les intérêts des couches moyennes improductives et de la petite bourgeoisie des villes. Dans les syndicats, dans les Unions Départementales, tout le monde n’a pas suivi, loin de là, et beaucoup de militants font part de leur agacement, de leurs doutes ou de leurs critiques. Elles doivent être entendues. Les salariés ont besoin d’un outil syndical de lutte des classes, pas d’un escabeau pour les politiciens de gauche. Ils ont besoin que le curseur soit mis sur les luttes, pour résister et pour renverser le capitalisme.
Face au recul des droits des travailleurs, à la liquidation des conquêtes sociales, à une inflation qui a rogné les salaires et augmenté la misère, à la poursuite d'une désindustrialisation qui génère le chômage et la précarité, à la répression syndicale qui s'abat brutalement contre ceux qui se battent, il n'y a pas d'autre alternative que de lutter et d'organiser une contre-offensive des travailleurs. C'est leurs luttes qui doivent imposer le tempo et non les supposés avancées de l'action parlementaire.
C'est dans cette optique, que nous devons nous saisir de l'initiative du 1er octobre pour les salaires, l'abrogation de la réforme des retraites, l'arrêt des licenciements, les statuts...Toutes ces questions nous devons les discuter dans les assemblées générales pour décider de l'action et tout particulièrement de la grève comme un moyen puissant de faire bouger le rapport de force car le patronat et son État ne comprennent que la force et lorsqu'on les tape au portefeuille !
Mais une journée n'y suffira pas, il faut une stratégie de développement des luttes avec des objectifs clairs et qui rassemblent les salariés dans la durée. Il est de la responsabilité des organisations syndicales et tout particulièrement de la CGT et de ses syndicats de créer les conditions d'une telle stratégie de lutte.