738-12/10/2021 Si l'actualité liée à la formation de l'alliance Aukus (acronyme de Australie, United Kindom et United State) dirigée contre la Chine et qui a justifié la rupture du contrat de sous-marins commandés par l'Australie à la France a fait la une des media (voir notre article(1) dans l'Hebdo N°735),
la réalité des tensions entre les USA et la Chine n'est pas nouvelle et se focalise aujourd'hui sur la question de Taïwan.
Quelle est l'origine de cette question? Taïwan est une île peuplée de 23 millions d'habitants au sud de la Chine dont elle est séparée par le détroit de Formose. Ce territoire chinois, appelé République de Chine, est passé sous le contrôle du Kuomintang nationaliste en 1949 à la suite de sa défaite face à l'Armée Populaire Chinoise. C'est là que se sont réfugiés quelques 2 à 3 millions de soldats nationalistes qui y ont suivi leur leader Tchang Kaï-chek. Jusqu'en 1971 la République de Chine était considérée comme l'unique représentant de la Chine à l'ONU. Ce n'est qu'à cette date que la République de Chine a perdu son statut et c'est la République Populaire de Chine (RPC) qui par la résolution 2758 a été reconnue comme l'unique représentante de la Chine. De fait, aujourd'hui, seuls 15 pays reconnaissent Taïwan comme un état souverain et parmi eux il n'y a aucune grande ou moyenne puissance. Ainsi, comme l'étaient Macao et Hong-Kong séparés de la Chine du fait de la colonisation, Taïwan est bien partie intégrante de la Chine.
Bien que reconnaissant la RPC, les USA, comme leurs alliés occidentaux et en grande partie asiatiques, ne se privent pas de pousser Taïwan sur le chemin de la sécession définitive d'avec la RPC en soutenant la dirigeante nationaliste et indépendantiste Tsai Ing-wen. Pour ne citer que quelques exemples, le Wall Street Journal signale récemment que l'armée taïwanaise est formée par des instructeurs US, tandis que la France y vend du matériel militaire. Récemment une délégation de parlementaires français dirigée par un ancien ministre de L. Jospin (A. Richard) a séjourné à Taïwan, donnant ainsi quitus de l'existence d'un état souverain.
Si Taïwan et la politique de ses dirigeants est si soutenue par les USA et ses alliés c'est que pour eux cette île représente un enjeu stratégique dans l’affrontement inter-impérialiste qui l'oppose à la Chine et une base d'agression potentielle contre elle.
Ainsi, la souveraineté sur les eaux de la mer de Chine est-elle disputée non seulement par la Chine mais aussi par des pays de la région comme : Brunei, Vietnam, Malaisie, Philippines... Ces eaux sont en effet situés sur une route maritime où transite un tiers du trafic commercial mondial. De plus, ces territoires sont riches en ressources halieutiques et disposeraient de réserves importantes de pétrole et de gaz. Cette zone âprement disputée fait l'objet de toutes les attentions militaires des différents protagonistes que ce soit sur mer ou dans les airs, et si l'on parle beaucoup des vols militaires chinois on oublie de dire que ceux des puissances adversaires sont aussi nombreux et pénétrant l'espace aériens exclusifs de la Chine. Récemment les USA se sont dotés de nouveaux moyens pour coordonner l'action de leurs forces dans la région. Ainsi, le département US de la Défense a mis sur pied une "China Integration Team" chargée de mettre en œuvre un plan de bataille par les airs et par la mer contre la Chine. De son côté la CIA vient de créer un département entièrement consacré à cette zone. La France n'est pas absente de ces interventions. Elle est militairement présente dans cette zone Asie-Pacifique, s'appuyant physiquement sur les colonies qu'elle y occupe encore. De plus, dans sa définition stratégique la zone indo-pacifique est devenue, comme pour les USA, une première priorité.
Ce déploiement de forces, leur activité, les déclarations belliqueuses, l'organisation d'alliances autour des principaux protagonistes de la zone indo-pacifique démontrent encore une fois le déplacement vers l'Asie des affrontements inter-impérialistes. Dans un contexte où les affrontements s'aiguisent entre les monopoles géants capitalistes, la question de la domination des ressources, des voies de communications et de contrôle de la force de travail s'aiguisent aussi et peuvent conduire à des conflits majeurs entre puissances impérialistes. C'est à dire à des conflits de type inter-étatiques.
D'où question : quelles sont la politique et la stratégie de défense de la France dans ce nouveau contexte international ? Elle se trouve définie par une contribution de Françoise Dumas, présidente de la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale, dans la Revue de la défense nationale, une contribution intitulée sans ambiguïté : « Éviter le déclassement stratégique en se préparant aux conflits qui viennent. »
Se référant à l’Actualisation stratégique 2021, présentée le 21 janvier 2021 par le ministère des Armées, Françoise Dumas stipule que de toutes les menaces recensées dans ce document, elle retient un avertissement : « un affrontement direct entre grandes puissances ne peut plus être ignoré ». Elle ajoute : « Dans ce contexte, l’hypothèse d’un affrontement direct de haute intensité, sous le seuil nucléaire, mais hybride par de multiples approches indirectes, ne peut plus être ignorée. Il convient de s’y préparer. »
De son côté, le général Thierry Burkhard lors de sa nomination comme Chef d’état-major des armées de terre a déclaré : « Le rapport de force redevient le mode de règlement des différends entre nations… nous devons résolument nous y préparer en gardant à l’esprit que le combat de haute intensité devient une option très probable. »
Ces déclarations ne sont pas faites à la légère, il s'agit bel et bien de préparer des conflits de haute intensité et d'y préparer l'opinion pour la rallier à l'idée que la guerre est inévitable. Le capitalisme constitue donc un danger mortel pour l'humanité. Les peuples n'ont rien à attendre de sa part que du sang et des larmes comme il l'a malheureusement si bien montré au cours des deux guerres mondiales et des guerres impérialistes menées contre les peuples qui n'ont cessé depuis d'endeuiller les populations du monde. La lutte résolue pour la paix et la coopération des peuples passe bien par le renversement du système capitaliste.