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730-18/08/2021 La prise de Kaboul par les Talibans a mis fin à une guerre de vingt ans de 2001 à 2021 menées par les puissances impérialistes sous l'égide de l'OTAN, contre le peuple afghan.

La défaite des USA, la première puissance économique et militaire, sonne comme un avertissement, celui de leur incapacité à dominer militairement "l'ordre mondial". À leur manière, le journal Les Echos souligne la portée de l'événement en publiant un article intitulé : "La victoire des Talibans, un tournant dans l'ordre mondial" et le candidat CDU à la chancellerie allemande d'ajouter:" c'est la plus grosse débâcle de l'OTAN depuis sa création".
La question qui interroge la plupart des observateurs se résume par: Comment en est-on arrivé là et si vite après le retrait des troupes US? Il est en effet clair, que le régime afghan mis en place par les USA, son armée et sa police financée et encadrée par les USA se sont liquéfiés en un temps record et pratiquement sans réaction. C'est dire le caractère fantoche et corrompu de ce régime dont le Président Ashraf Ghani prend la fuite, emportant au passage une partie de l'argent volé au peuple et dont les principaux dirigeants font allégeance aux vainqueurs. Pourtant, les USA n'ont pas lésiné sur les moyens pour soutenir à bout de bras ce régime en engageant près de 1.000 milliards de dollars dans l'opération.
Aux USA, A. Blinken justifie l'intervention US comme une riposte aux attentats du 11 septembre 2001 en ajoutant: " Rester [en Afghanistan] n'est pas dans notre intérêt". Il déroule la thèse officielle telle que l'a exprimé J. Biden qui a affirmé selon l'AFP ce lundi: "une guerre encore plus longue en Afghanistan aurait profité à la Chine et à la Russie", alors même que son chef de la diplomatie s'entretenait avec ces deux rivaux des Etats-Unis, et de la Chine qui ont l'intention d'entretenir des relations avec les talibans. Si L'ex-président Trump, appelle la démission de Biden pour avoir trahi en Afghanistan, il oublie de rappeler que le retrait US, sans condition, et avec comme seul interlocuteur les Talibans a été négocié et signé en février 2020 sous sa présidence à Doha. Négociations menées en présence de Abdul Ghani Baradar chef militaire des Talibans, que Washington a fait libérer en 2018 alors qu’il était emprisonné depuis 2010 au Pakistan. Cette ligne de retrait était une constante de la politique américaine depuis plusieurs années et a été reprise par Trump, puis Biden. Nous avions dans un article précédent montré le sens général de cette politique de redéploiement (https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/proche-et-moyen-orient/1410-afghanistan-retrait-us-et-de-l-otan-pour-une-nouvelle-disposition-de-leurs-forces).
Les réactions des grandes puissances intéressées de près ou de loin à la situation en Afghanistan sont significatives de leur positionnement. Pour l'essentiel celles liées à l'OTAN et c'est le cas de la France qui a eu sa part de participation à la guerre, s'alignent sur les positions US. C'est le cas de Macron dont le discours de lundi soir peut se résumer en deux mots: danger islamiste et crainte d'un afflux de réfugiés. Ces puissances s'activent pour retirer leur personnel diplomatique et de sécurité, tandis que d'autres comme l'Iran, le Pakistan, la Russie et la Chine qui ont déjà pris langue avec les Talibans maintiennent leur représentation diplomatique et entendent coopérer avec le futur pouvoir en Afghanistan. La Chine, par la voix de Hua Chunying, porte-parole de la diplomatie chinoise: " souhaite des relations amicales avec l'Afghanistan". Il est vrai que la Chine a déjà des intérêts importants en Afghanistan où, elle a obtenu un contrat de 30 ans pour l'exploitation du cuivre sur le site de Mes Aynak. De son côté la Russie renforce ses bases militaires dans le Tadjikistan voisin et l'Iran ne peut que se réjouir de l'affaiblissement des USA dans la région quant au Pakistan, son emprise sur le mouvement Taliban lui donne des moyens de contrôle sur cette région stratégique.
Le fait de l'affaiblissement de la présence américaine profite selon le journal Les Echos à la Chine, ainsi dans son édition du 16 août il titre: " Un tournant dans l'ordre mondial", au bénéfice de la Chine". C'est dire que la défaite des USA et de l'OTAN renvoie bien aux luttes au sein du système impérialiste.
Dans ces conflits, et celui de l'Afghanistan n'y échappe pas, ce qui prime se sont les intérêts des puissances impérialistes pour contrôler les ressources, les voies de communications, la force de travail et les territoires. Pour masquer ces réalités, elles s'emploient à les maquiller sous le prétexte des droits de l'homme. Ainsi pour l'Afghanistan, les grands media versent-ils des larmes de crocodiles sur le sort malheureux des afghans qui seront soumis à la politique réactionnaire et obscurantiste des Talibans. S'appuyant sur cette réalité, ils tentent de justifier les interventions militaires et ils glorifient l'ordre économique social et moral capitaliste. Dans ce sens, le mensonge est un outil de propagande comme un autre. Ainsi, les tenants de l'ordre impérialiste assurent que la défaite US est une défaite de la démocratie et qu'il n'y a rien à faire contre les forces obscurantistes. En disant cela, ils veulent faire oublier les longues luttes démocratiques du peuple afghan, luttes qui ont eu pour résultat la révolution de 1978 contre précisément ces forces réactionnaires et obscurantistes. Cette révolution a amorcé une avancée significative dans l'ordre social, économique, politique et culturel et tout particulièrement pour libérer la paysannerie pauvre des seigneurs de la terre. Elle a entrepris l'éducation de masse de la jeunesse et la libération des femmes afghanes. Cela en était trop pour l'impérialisme. Il lui fallait à tout prix abattre le régime progressiste et en finir avec la libération du peuple afghan. A partir de 1989, lorsque l’URSS à la demande du gouvernement Afgan est intervenu pour le soutenir, les mêmes qui ont permis aujourd'hui le retour au pouvoir des talibans ont alors organisé, financé et soutenu idéologiquement les forces les plus réactionnaires pour combattre militairement le régime qui avec le soutien de l'URSS a pu contenir pour un temps les assauts de l'impérialisme et de ses alliés locaux ; les pays impérialistes ont orchestré une campagne internationale accusant mensongèrement l’URSS d’avoir envahi l’Afghanistan, leur pression, ,les difficultés internes au régime et les décisions de la direction de l’URSS dans la recherche d’un accord avec les USA ont accéléré son retrait de ce pays, laissant la voie ouverte aux forces de la contre-révolution. Les forces progressistes et révolutionnaires abattues, ce fut le règne des ben Laden (qui a reçu plus de 3,5 milliards – de l’Arabalie-Saoudite et des USA) et de leurs alliés qui ont détruit physiquement tout ce que l'Afghanistan comptait de militants capables de moderniser et de démocratiser le pays. À l'époque nous avons été des dizaines de milliers à soutenir la révolution afghane et nous l'avons dit dans une pétition qui n'a valu que des insultes et des sarcasmes de beaucoup de ceux qui aujourd'hui pleurent hypocritement sur le sort du peuple d'Afghanistan.
Quant à nous, nous n'avons pas changé, nous disons bien sûr qu’il faut accueillir et aider les réfugiés afghans et nous continuons de dénoncer et de combattre l'impérialisme y compris celui de la France. Notre soutien va à tous ceux qui en Afghanistan n'acceptent ni l'ordre impérialiste, ni celui des forces obscurantistes et réactionnaires qui viennent d'y prendre le pouvoir.

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