Gantry 5

 

N° 859 08/02/2024  Deux grandes manifestations contre la guerre d'Algérie ont été réprimées dans le sang à quelques mois d'intervalle, celle du 17 octobre 1961 et celle du 8 février 1962. La première causa la mort de plusieurs dizaines de travailleurs algériens, peut-être davantage, car aucun chiffre précis n'a jamais pu être établi; la seconde, fit 8 victimes, au métro Charonne, à Paris, et blessa, au total, plus de 250 manifestants.
Alors que la guerre en Algérie arrive à son terme du fait de la victoire du peuple algérien sur l'impérialisme français qui l'a contraint à accepter l’indépendance(1).
Les partisans de l'Algérie française font tout pour empêcher ce processus et sèment la terreur fasciste sur le territoire algérien et français.
Sous le couvert de l'Organisation de l'Armée Secrète (OAS), ces factieux assassinent en Algérie et en France des algériens et des français luttant pour l'indépendance de l'Algérie. En janvier 1962, l'OAS multiplie les attentats visant des personnalités ou organisations politiques. Le 4 janvier, un commando mitraille l'immeuble du Parti communiste, blessant grièvement un militant. Puis ce fut le domicile de Jean-Paul Sartre qui fut l'objet d'un plasticage. Le 7 février, l'OAS lança une nouvelle campagne d’attentats visant une dizaine de personnalités. La bombe qui explosa devant le domicile d'André Malraux, le ministre de la Culture, défigura une fillette(2) de 4 ans.
Un rassemblement pacifique est prévu le 8 février Place de la Bastille, à l'appel du Parti communiste, du PSU, de la CGT et d'autres syndicats comme la CFTC, la FEN et l'Unef ainsi que des organisations de gauche, elle est interdite par le préfet Maurice Papon, sur fond d'état d'urgence en vigueur depuis avril 1961.
 
Les organisateurs appellent "les travailleurs et tous les antifascistes de la région parisienne à proclamer leur indignation, leur volonté de faire échec au fascisme et d'imposer la paix en Algérie".
Cinq cortèges de manifestants partis de différentes stations du métro doivent rejoindre la Bastille. La police a ordre de disperser coûte que coûte les rassemblements. Les heurts sont très violents avec les forces de l'ordre mais c'est au retour que le drame éclatera. Boulevard Voltaire les CRS chargent, "matraques en avant", les manifestants cherchant à fuir les charges policières et s'engouffrent dans le métro Charonne.
Une bousculade meurtrière s'ensuit, des policiers poursuivent les manifestants pour les frapper, des personnes bloquées par les portillons d'accès aux quais sont étouffées sous la pression, d'autres meurent le crâne fracassé sous les coups.
On relèvera huit morts, dont trois femmes et un apprenti de 15 ans. Un homme mourra huit semaines plus tard de ses blessures. Tous sont syndiqués à la CGT et membres du PC, à l'exception d'une victime.
Pour les obsèques des victimes le 13 février 100.000 à 200.000 personnes y participeront.
Le ministère de l'Intérieur prétendra par la suite que les grilles de la station étaient fermées. En réalité, nous savons aujourd'hui qu'au moment de la charge policière, ces grilles étaient ouvertes, et que les policiers ont poursuivi les manifestants à l'intérieur des couloirs et sur les quais de la station.
Un réel carnage qui n'empêcha pas Michel Debré, alors Premier ministre, d'écrire une lettre à Maurice Papon(3), le 13 avril 1962, dans laquelle il rendait "un particulier hommage à [ses] qualités de chef et d’organisateur, ainsi qu’à la façon dont [il avait] su exécuter une mission souvent délicate et difficile".(...)
 
Si à la suite d'interminables démarches et commémorations, la station de métro Charonne porte désormais la mention Place du 8 février 1962, la reconnaissance de ce crime odieux comme un crime d'État n'a jamais été reconnu malgré les sempiternelles déclarations des chefs de l'État successifs sur la nécessaire réconciliation franco-algérienne et de ce point de vue, Macron reste muet! A l'heure de la banalisation des idées d'extrême droite, nous ne nous résignons pas à honorer la mémoire de ces militants et de leur combat contre le fascisme.
Nous exigeons que le crime d'Etat soit reconnu pour les 9 victimes de cette manifestation qui défendait la paix en Algérie.
Tous ces militants, dont nous continuons à commémorer le courage et la lucidité politique, sont cela mêmes qui refusèrent les discours de la puissance colonisatrice française en Algérie.
Déjà, comme aujourd'hui avec la lutte du peuple palestinien pour ses droits au retour et à un État, les dirigeants impérialistes français traitaient de terroristes les combattants de l'indépendance algérienne. Ils leurs reprochaient de ne pas mener une lutte politique bien propre qui ne remette pas en cause la puissance coloniale. À ses tortionnaires Larbi Ben M'hidi, chef historique du FLN qui coordonna à Alger l'action de la guérilla et qui fut arrêté le 15 février 1957, rétorqua, à propos des attentats : " Donnez-nous vos chars et vos avions, et nous vous donnerons nos couffins ", dans lesquels les terroristes plaçaient leurs bombes. Il fut torturé puis pendu le 5 mars 1957. Tous ces crimes, l'État français les assume de fait. Il n'a pas varié dans le rôle de puissance impérialiste en  soutenant le génocide qu'organise l'État colonisateur sioniste qui continue à vouloir expulser de ses terres le peuple palestinien.
(2)La petite fille de 4 ans non seulement a été défigurée mais elle a perdu  un œil et quelques années plus tard elle est devenue complètement aveugle des suites de l'attentat
(3) En 1998, il est condamné à dix ans de réclusion criminelle pour complicité de crimes contre l'Humanité concernant des actes d'arrestation et de séquestration, lors de l'organisation de la déportation des Juifs de la région bordelaise vers le camp de Drancy, d'où ils sont ensuite acheminés vers le camp d'extermination d'Auschwitz, commis quand il était secrétaire général de la préfecture de Gironde, entre 1942 et 1944
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